La nomination des individus qui gouvernent les banques centrales donnent toujours lieu à d’intenses tractations et débats politiques. C’est un signe supplémentaire que, contrairement à l’image qu’elles se donnent parfois, ces institutions ne sont pas des boîtes noires technocratiques suivant aveuglement une règle prédéfinie ; la politique ne reste pas au seuil de la maison.
Nous l’avons vu encore récemment en Europe avec la démission de Jens Weidmann, président de la banque centrale allemande, en raison du changement de gouvernement. La nomination de son successeur, Joachim Nagel, fut l’objet de longues négociations quant à la place de ce dernier dans l’équilibre difficile de la nouvelle coalition de gouvernement.
Un débat d’une toute autre ampleur agite aujourd’hui les médias et le monde politique aux Etats-Unis après la nomination par le Président Biden de Lisa Cook au conseil des gouverneurs de la banque centrale (Fed). Lisa Cook, économiste reconnue et engagée pour la défense des droits des Africains-américains, deviendrait la première femme noire à occuper ce poste.
Sa nomination a immédiatement suscité des attaques misogynes et racistes visant à nier son expérience et sa légitimité. Pour comprendre ce que représente aujourd’hui la nomination de Lisa Cook, il est utile de revenir sur l’histoire des enjeux symboliques et politiques associés à la composition des instances dirigeantes des banques centrales.
De la finance privée à l’expertise économique
La personnalité, l’engagement politique, la formation universitaire et l’expérience professionnelle des dirigeantes ou dirigeants de banques centrales influencent sans surprise les orientations de la politique monétaire et financière, comme cela a récemment été souligné par plusieurs études de recherche. Le mandat des banques centrales étant relativement général et imprécis, le choix des personnes…