Depuis le lancement du programme de visa humanitaire “humanitarian parole” le 6 janvier 2023 par le président américain Joe Biden, ce sont des centaines de milliers d’Haïtiens et d’Haïtiennes, dont des professionnels, ayant quitté Haïti à la recherche d’une vie meilleure aux États-Unis.
Voulant fuir la misère, l’insécurité et le chômage qui sévissent en Haïti, le programme “humanitarian parole” arrive comme une goutte d’eau dans le désert pour bon nombre d’Haïtiens et d’Haïtiennes.
Une quantité importante de ces migrants et migrantes arrivés de manière régulière sur le territoire américain dans le cadre du programme humanitaire de séjour conditionnel (“Humanitarian Parole”) ont reçu le support de plusieurs organisations dont l’Immigrant Family Services Institute (IFSI-USA), une organisation basée dans l’État du Massachusetts.
Dans une interview à Caribbean Television Network (CTN) deux des bénéficiaires du programme “humanitarian parole” nous ont fait part de la situation en Haïti avant leur arrivée aux États-Unis, mais aussi de leur intégration au sein de la société américaine en tant que bénéficiaires du programme communément appelé Programme Biden.
Mackendy Saint Rose, jeune professionnel de la plomberie, est entré aux États-Unis dans le cadre de ce programme. Pour lui, c’est la concrétisation d’un rêve.
“Je suis entré aux États-Unis le 7 janvier 2024. Je me suis installé dans l’État du Massachusetts, particulièrement à Boston. C’est ma tante qui avait rempli l’application pour moi depuis le mois de mai 2023. Nous sommes 6 personnes membres d’une seule famille qui ont bénéficié du programme.”
Contrairement à certains autres migrants haïtiens arrivés chez leur famille d’accueil, Mackendy Saint Rose se dit “très satisfait de l’accueil qui lui a été offert par la famille de sa tante et les membres de l’équipe de l’Immigrant Family Services Institute (IFSI-USA).
Étant donné que c’est une communauté haïtienne, ça se passe plutôt bien en ce qui concerne mon intégration.”
Ce jeune professionnel, qui se réjouit d’avoir quitté l’insécurité d’Haïti, dit arriver sur le sol de l’Oncle Sam avec un seul objectif : travailler pour se donner une vie meilleure.
“Aux États-Unis pour réaliser mes rêves.”
“Je suis un plombier. Je suis venu aux États-Unis pour travailler. Nous avons quitté le pays à cause des mauvaises situations. Le chômage et l’insécurité nous guettent partout. Je vivais dans la commune de Tabarre, au nord de la capitale Port-au-Prince. Imaginez-vous, chez moi, ce sont les crépitements des armes qui me réveillent tous les jours. Ce n’est pas une bonne situation. Chaque jour, des gens quittent leurs maisons à cause de la violence des gangs. C’est une situation frustrante et insupportable.”
“Je suis venu ici à la recherche d’un mieux-être. D’ici deux ans, j’espère trouver la stabilité économique et financière pour fonctionner normalement au niveau de la société américaine. Mon rêve, c’est de travailler pour faire venir ma femme et mon enfant laissés en Haïti. Arrivé au pays, je suis un peu plus calme, même si ma famille vit encore en Haïti.”
En ce qui concerne son intégration, ce jeune père de famille, l’air optimiste, dit vouloir prendre le temps nécessaire pour mieux s’intégrer, tout d’abord en apprenant la langue anglaise et en se familiarisant avec le fonctionnement du système américain, toujours avec de grandes ambitions.
“C’était un rêve de venir ici aux États-Unis. Je suis un professionnel. J’ai de l’énergie pour travailler et je suis venu pour travailler et combler mes lacunes financières. Prendre soin de ma famille, me procurer une maison et une voiture. Disons, tout ce qui est bon pour mener une vie décente. Haïti est toujours dans un coin de ma tête. Je suis un Haïtien. C’est mon pays”, dit-il fièrement. “Mais pour y retourner, j’aimerais que les choses changent. J’aimerais qu’il y ait quand même un bon climat de sécurité”, espère-t-il.
C’est pratiquement la même situation pour Chenley Joseph, originaire de la Ville des Gonaïves dans le département de l’Artibonite.
Marié, Chenley Joseph est père d’un garçon de 12 ans et d’une fille de 4 ans. Il dit avoir quitté le pays à cause des problèmes sociaux, économiques, politiques, et de la terreur des gangs qui installent une insécurité invivable au pays.
“Je suis un enseignant, je suis aussi un professionnel en carrelage. Mais à cause de la situation qui prévaut au pays, j’ai eu pas mal de difficultés à subvenir aux besoins de ma famille. Je suis un homme ayant de l’énergie pour travailler. Mais l’insécurité m’empêche de travailler. En tant que bénéficiaire du programme Biden, je suis ici aux États-Unis grâce à ma tante qui m’avait inscrit au programme le 2 février 2023.”
Arrivé aux États-Unis en janvier 2024, près d’un an après que sa tante lui avait inscrit au programme, Chenley Joseph a pris le temps de nous raconter son voyage.
“Pour venir aux États-Unis, je suis passé par le Cap-Haïtien. J’ai emprunté cette voie en voulant éviter la route périlleuse conduisant à Port-au-Prince, sachant que plusieurs axes de ce tronçon sont occupés par des gangs armés qui tuent, enlèvent et violent des personnes en toute impunité. Je dois vous dire que le jour même de mon voyage, plusieurs personnes ont été kidnappées à Morne à Cabris dans un minibus. Heureusement, j’avais l’intelligence et la clairvoyance nécessaires pour ne pas emprunter ces voies”, dit-il.
“L’intégration aux États-Unis n’est pas facile, mais on s’adapte.”
“La première chose que je compte faire ici, c’est de maîtriser la langue anglaise. J’ai déjà un certain niveau, mais je compte m’améliorer. Sur ce, je dois remercier les gens de l’Immigrant Family Services Institute (IFSI-USA), qui m’aident dans de nombreux domaines”, a déclaré Chenley Joseph, l’air reconnaissant.
“Je dois dire que les gens sont très gentils ici. Ils nous aident à mieux nous adapter. Je viens ici tous les vendredis après-midi, parce que je pense que cela peut m’aider à m’intégrer davantage dans la société américaine.”
“Mais je dois aussi vous dire que vivre dans un pays et avoir sa famille dans un autre n’est pas facile. Je suis un éducateur, je connais la responsabilité d’un père envers ses enfants. Ça aurait été génial si ma femme et mes enfants étaient à mes côtés. Étant donné que c’est un programme qui offre une opportunité pendant deux ans, j’espère obtenir mon permis de travail me permettant de fonctionner pleinement. Car je suis venu ici pour travailler et m’occuper de ma famille”, confie-t-il, précisant que sa femme et ses enfants ne sont pas inscrits au programme.
Selon des données communiquées à la fin du mois de janvier 2024 par les Services de la Citoyenneté et de l’Immigration des États-Unis (USCIS), plus de 356 000 personnes (Cubains, Haïtiens, Nicaraguayens et Vénézuéliens) sont déjà arrivées sur le territoire américain dans le cadre du programme humanitaire de séjour conditionnel (“Humanitarian Parole”).
Ce chiffre était réparti ainsi pour les personnes déjà arrivées aux USA jusqu’au mois de janvier dernier : 138 000 Haïtiens, 86 000 Vénézuéliens, 74 000 Cubains, 58 000 Nicaraguayens.