Dossier Eliana Thelemarque : La tentative honteuse du ministère haïtien à la Condition féminine de sauver la face

André Louis

Après plusieurs jours de silence du gouvernement haïtien sur le dossier de la jeune mère décédée après avoir assisté, impuissante, à l’assassinat de son nourrisson de deux mois, le Ministère à la Condition Féminine et aux Droits des Femmes tente honteusement de sauver la face.

Dans un communiqué daté du 16 février mais publié deux jours plus tard, la titulaire du MCFDF dit exprimer son “indignation” et sa “tristesse” face à la mort tragique d’Eliana Thelemarque.

La jeune mère, après avoir assisté impuissante à l’assassinat barbare de son nourrisson de deux mois, a succombé quelques jours plus tard à une détresse insurmontable. Un crime d’une brutalité inouïe qui secoue une fois de plus la population haïtienne.

Eliana Thelemarque a vu son bébé lui être arraché et exécuté devant elle par des hommes armés.

Plongée dans un état de choc, la mère endeuillée, comme toutes les autres victimes, n’a bénéficié d’aucun support psychologique qui aurait pu lui permettre de se remettre de l’ignominie qu’elle avait vécue. Seule face à sa douleur, abandonnée à son sort, elle s’est éteinte.

Comme s’il y avait une politique réelle de prise en charge des victimes, le ministère affirme qu’une équipe avait été dépêchée pour identifier et soutenir la victime. “Toutes les dispositions avaient déjà été prises pour accorder un appui psychologique à la victime”, a informé le ministère dans un communiqué qui frise l’indécence et le ridicule.

Alors que le ministère tente de se positionner en défenseur des femmes victimes de violences, la réalité sur le terrain montre une tout autre image : celle d’un gouvernement qui multiplie les discours mais reste inactif. Aucune prise en charge d’urgence, aucun hébergement sécurisé, aucune aide psychologique n’ont été fournis. Comme la population générale, la ministre se contente de dénoncer cette barbarie à travers un communiqué sans portée réelle, laissant entendre une solidarité qui n’a jamais existé.

“Femmes et filles, hommes et garçons, mères et pères doivent cesser d’être victimes de violences, de destructions et de la terreur répandue par les gangs dans la zone métropolitaine et certaines communes du Bas-Artibonite depuis quelque temps”, a écrit la ministre dans un communiqué qui ressemble plus à une note de protestation d’une organisation quelconque qu’à une réaction gouvernementale.

Plus que toute autre chose, cette communication s’apparente à une réaction opportuniste d’une ministre plus préoccupée à soigner son “image” plutôt qu’à répondre aux obligations de son institution.

Le Ministère à la Condition Féminine et aux Droits des Femmes, censé être en première ligne pour défendre les droits des femmes et assurer leur protection, se contente ici d’un simple exercice de communication politique.

Combien de victimes comme Eliana Thelemarque faudra-t-il encore pour que l’État prenne ses responsabilités ? Combien de mères en Haïti devront encore enterrer leurs enfants sous les balles des gangs ? Combien de femmes brisées devront affronter seules leur douleur pendant que l’État se contente de communiqués ? Jusqu’à quand le ministère à la Condition Féminine restera-t-il un simple spectateur des tragédies qu’il prétend condamner ?

André Louis

Emmanuel Paul

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