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Situation Sécuritaire en Haiti: Un rapport de l’ONU révèle que les gangs Haïtiens sont plus forts que la Police”

Emmanuel Paul
Emmanuel Paul - Journalist/ Storyteller

Selon les experts de l’ONU, certains des gangs en Haïti possèdent des arsenaux plus importants que la police, alimentant ainsi leur croissance en devenant “plus forts, plus riches et plus autonomes”. Cette tendance inquiétante révèle la montée en puissance des groupes criminels dans le pays, alimentée par le trafic d’armes.

Certains gangs Haïtiens disposent d’arsenaux plus importants que ceux de la police, car les groupes criminels deviennent “plus forts, plus riches et plus autonomes” en utilisant le trafic d’armes pour alimenter leur croissance, selon des experts de l’ONU.

Une situation qui a plongé la nation caribéenne dans une crise politique et humanitaire permanente et sans précédent.

Actuellement, il y a “des niveaux sans précédent d’anarchie”, a déclaré Sylvie Bertrand, représentante régionale de l’ONUDC, à l’agence de presse de l’ONU.

Des AK-47 russes aux AR-15 américains en passant par les fusils d’assaut israéliens Galil, un trafic d’armes de plus en plus sophistiqué s’est emparé d’Haïti depuis 2021, a déclaré l’Office des Nations Unies contre la drogue et le crime (ONUDC) dans son dernier rapport sur le commerce illégal d’armes en Haïti.

Un grand nombre de ces armes illégales sont à l’origine des récentes informations faisant état d’attaques de snipers au hasard, de pillages en masse, d’enlèvements et d’attaques de prisons pour libérer des milliers de détenus, ce qui a entraîné le déplacement de plus de 362 000 Haïtiens fuyant la violence, a fait savoir l’ONU dans un rapport publié samedi sur son site internet.

Selon Robert Muggah, expert indépendant et auteur de “Haiti’s Criminal Markets”, certains gangs utilisent le trafic d’armes pour étendre leur influence et revendiquer des emplacements (zones) stratégiques, ce qui entrave les efforts visant à mettre un terme à l’entrée illégale d’un nombre croissant d’armes.

“La situation en Haïti est très déconcertante et inquiétante, probablement la pire que j’aie vue en plus de 20 ans de travail dans le pays”, a déclaré M. Muggah.

Trafiqués principalement depuis les États-Unis, ces “arsenaux mortels” signifient que les gangs ont “une puissance de feu qui dépasse celle de la police nationale haïtienne”, selon le groupe d’experts de l’ONU chargé de surveiller les sanctions imposées par le Conseil de sécurité à Haïti en 2022, face à l’aggravation de la violence des gangs armés.

Le problème est que plus les armes entrent, plus les gangs étendent leur contrôle sur des points stratégiques tels que les ports et les routes, ce qui rend encore plus difficile pour les autorités d’empêcher le trafic d’armes, a déclaré Mme Bertrand de l’ONUDC.

Certaines des conséquences de la violence endémique des gangs se manifestent en Haïti.

Une analyse soutenue par l’ONU a révélé que près de la moitié des 11,7 millions de citoyens Haïtiens ont besoin d’une aide alimentaire, et les déplacements massifs se poursuivent alors que les gens fuient leur résidence habituelle pour se mettre à l’abri.

Les hôpitaux signalent une forte augmentation du nombre de morts et de blessés par balle.

“Le nombre croissant d’armes en circulation et la modernisation des arsenaux ont un impact sur la létalité et la gravité des blessures infligées”, a déclaré le personnel médical d’Haïti au groupe d’experts de l’ONU.

On estime que 150 à 200 groupes armés opèrent actuellement en Haïti, un pays qui partage l’île d’Hispaniola avec la République dominicaine, a déclaré M. Muggah, qui est un expert indépendant en matière de sécurité et de développement.

À l’heure actuelle, environ 23 gangs opèrent dans la région métropolitaine de Port-au-Prince, répartis en deux grandes coalitions : G-Pèp, dirigé par Gabriel Jean Pierre, dit Ti Gabriel, et G9 Family and Allies, dirigé par Jimmy Chérizier, dit Barbecue, ont fait savoir les experts onusiens ayant analysé la situation d’Haiti.

Ces derniers mois, les deux factions rivales ont uni leurs forces “dans des attaques coordonnées” visant l’aéroport, le Palais national, le Théâtre national, les hôpitaux, les écoles, les commissariats de police, les bureaux de douane et les ports, “forçant ainsi leur volonté et étendant leur territoire”, a-t-il expliqué.

“Les gangs contrôlent en fait des zones très stratégiques de la capitale et les routes principales reliant Port-au-Prince aux ports et aux frontières terrestres, ainsi que les villes et les zones côtières, où se déroulent de nombreux trafics”, a déclaré M. Muggah.

Le trafic d’armes est une activité très lucrative, même en petites quantités, car la demande d’armes augmente et les prix sont élevés, a constaté le groupe d’experts citant à titre d’example  un fusil semi-automatique de 5,56 mm coûtant quelques centaines de dollars aux États-Unis est régulièrement vendu entre 5 000 et 8 000 dollars en Haïti.

Les experts ont également constaté la présence d'”armes fantômes”, qui sont fabriquées par des particuliers avec une relative facilité en achetant des pièces détachées en ligne, évitant ainsi les processus de contrôle qui s’appliquent aux armes à feu fabriquées en usine. Ces armes ne sont pas sérialisées et sont donc intraçables.

Selon le rapport de l’ONUDC, un petit nombre de gangs Haïtiens sont hautement spécialisés dans l’acquisition, le stockage et la distribution d’armes et de munitions.

La plupart des armes à feu et des munitions introduites en Haïti, que ce soit directement ou par l’intermédiaire d’un autre pays, proviennent des États-Unis, a rappelé Mme Bertrand de l’ONUDC, ajoutant que les armes et les balles sont généralement achetées dans des points de vente au détail agréés, des expositions d’armes à feu ou des prêteurs sur gages, et expédiées par voie maritime.

Des soupçons ont également émergé concernant des opérations illégales impliquant des vols non enregistrés et de petits aéroports le long de la côte sud de la Floride, ainsi que la présence de pistes d’atterrissage clandestines en Haïti, a-t-elle ajouté.

L’ONUDC a identifié quatre itinéraires de trafic empruntant les frontières poreuses d’Haïti, deux en provenance de Floride via des cargos vers Port-au-Prince et vers les côtes nord et ouest via Turks et Caicos et les Bahamas, et d’autres via des porte-conteneurs, des bateaux de pêche, des barges ou de petits avions arrivant dans la ville du nord.

La communauté internationale a un rôle crucial à jouer pour faire face à cette crise, a fait savoir l’ONU dans son rapport soulignant la nécessité de stabiliser la sécurité en Haïti et de soutenir la police nationale haïtienne. Le renforcement des institutions chargées de l’application de la loi doit être priorisé, selon les Nations-Unies qui espèrent que la future mission de soutien à la sécurité multinational mandatée par son Conseil de sécurité devrait apporter une aide essentielle à cet égard.

L’agence multinationale en avait profité pour attirer l’attention de la communauté internationale sur la nécessité d’intensifier ses efforts pour soutenir Haïti et aider à stabiliser la situation sécuritaire afin d’éviter qu’Haiti sombre davantage dans le chaos.

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