En 1979, lors de l’inauguration de la Télévision Nationale d’Haïti (TNH), Jacques Lemaire, son premier directeur, prononça un discours mémorable devant le chef de l’État et la population haïtienne. Ce discours reflétait l’ambition d’un gouvernement déterminé à doter le pays d’un patrimoine technologique moderne et structuré.
Lemaire évoqua les démarches entreprises pour la mise en place de cette institution : les équipements de production et de diffusion, le site de Boutillier pour desservir la région métropolitaine, ainsi que celui de La Gonâve, destiné à couvrir les villes côtières. Il annonça également des projets d’expansion visant à offrir une couverture nationale avec des réalisations concrètes dès 1980 : le site Bijou pour l’Artibonite, Virgie pour le Nord, et Haut-Piton pour le Nord-Ouest.
Il alla même jusqu’à anticiper l’ère numérique, évoquant une technologie qui permettrait la diffusion à partir d’ordinateurs. Ces déclarations témoignaient d’une vision à long terme et d’une compréhension profonde de l’importance de la TNH comme outil de formation, d’information et d’éducation pour le peuple haïtien.
UNE VISION ÉTEINTE
Aujourd’hui, après 45 ans d’existence, la TNH est devenue l’ombre d’elle-même. Cette vieille institution, autrefois porteuse de promesses, semble s’enliser dans une lente agonie. Les infrastructures sont vétustes, les contenus rarement à la hauteur de leur mission première, et l’institution peine à répondre aux besoins d’une société en constante évolution.
Pire encore, le silence de ses dirigeants face à cette dégradation est assourdissant. Où est la vision ? Où sont les plans stratégiques pour moderniser la TNH et lui permettre de s’adapter à un paysage audiovisuel désormais dominé par les nouvelles technologies ? Pourquoi le Ministère de la Culture et de la Communication, son ministère de tutelle, ne pourrait-il pas, au moins, présenter un discours clair à la population pour expliquer ce que l’on doit attendre de cette institution ?
UN APPEL À LA RENAISSANCE
La TNH n’est pas qu’un simple outil de divertissement. C’est un patrimoine national, un pilier de notre souveraineté culturelle, et un instrument indispensable pour réorienter un peuple en quête de repères. Peut-on laisser mourir un tel héritage sans agir ?
Il est urgent de réfléchir à la manière de redonner vie à cette institution. Cela passe par des investissements sérieux, une modernisation des équipements, et surtout une vision claire et audacieuse.
La TNH peut encore redevenir une force motrice pour éduquer, informer et unir la population haïtienne. Mais pour cela, elle a besoin de dirigeants inspirés, soutenus par un véritable engagement de l’État et de la société civile.
La question reste posée : existe-t-il encore une TNH digne de ce nom ? Ou assistons-nous avec impuissance à l’extinction d’un rêve qui, en 1979, semblait si prometteur ?
Nancy ARCELIN
Secrétaire Générale Adjointe
SEME