Le récent appel des Nations unies à une action “audacieuse et urgente” en faveur d’Haïti souligne la gravité de la situation à laquelle est confrontée cette nation des Caraïbes.
La corruption, l’impunité et la mauvaise gouvernance frappent Haïti depuis des années, exacerbant les problèmes sociaux,
économiques et politiques. Associés à l’escalade de la violence des gangs, ces problèmes ont érodé l’État de droit et conduit les institutions de l’État au bord de l’effondrement, selon le dernier rapport des Nations-Unies sur Haiti.
Le haut-commissaire des Nations unies aux droits de l’homme Volker Türk, a souligné qu’il fallait absolument s’attaquer à l’insécurité en priorité afin de protéger la population et d’éviter de nouvelles souffrances humaines. L’impact de l’insécurité généralisée sur la population haïtienne est terrible et se détériore rapidement, compromettant gravement les droits de l’homme et exacerbant les crises humanitaires à travers le pays, a regretté monsieur Türk.
Le dernier rapport, qui couvre la période du 25 septembre 2023 au 29 février 2024, fournit des statistiques alarmantes sur les victimes de la violence des gangs.
Seulement pour l’année 2023, 4 451 personnes ont perdu la vie et 1, 668 ont été blessées à la suite d’incidents liés aux gangs. Ces chiffres soulignent l’omniprésence de la violence dans les communautés haïtiennes, des civils innocents faisant les frais du conflit.
En outre, les violences sexuelles perpétrées par les gangs restent une préoccupation majeure, en particulier à l’encontre des femmes et des jeunes filles. Le rapport met en lumière des cas où des femmes ont été violées lors d’attaques de gangs, souvent après avoir assisté à l’assassinat brutal de leurs proches. Certaines femmes sont contraintes d’avoir des relations sexuelles avec des membres de gangs, tandis que le viol d’otages est utilisé comme moyen d’extorquer des rançons aux familles, a révélé le dernier rapport des Nations-Unies.
Les enfants font partie des groupes les plus vulnérables touchés par la crise en Haïti
Les gangs recrutent et exploitent fréquemment les enfants, les soumettant à la violence, à la coercition et à l’exploitation. Dans certains cas, de jeunes membres de gangs qui tentaient de quitter leurs rangs ont été tués, ce qui met encore plus en évidence les conditions périlleuses auxquelles sont confrontés les jeunes haïtiens. De plus, la prolifération des gangs a perturbé la vie quotidienne, imposant des restrictions à la circulation des personnes, des biens et des services, exacerbant les besoins humanitaires et entravant l’accès aux services essentiels.
Alors que la situation sécuritaire continue de se détériorer, des “brigades d’autodéfense” sont apparues, exacerbant encore le cycle de la violence et de l’autodéfense. Le rapport fait état d’une augmentation alarmante des cas de lynchage, avec au moins 528 incidents signalés en 2023 et 59 cas supplémentaires enregistrés cette année.
En outre, malgré les embargos sur les armes, les gangs ont continué à se procurer des armes et des munitions à travers des frontières poreuses, ce qui leur donne un avantage considérable sur les autorités chargées de l’application de la loi.
En réponse à l’escalade de la crise, le rapport de l’ONU appelle à des contrôles nationaux et internationaux plus stricts pour endiguer le trafic d’armes et de munitions vers Haïti. En outre, le déploiement urgent d’une mission multinationale de soutien à la sécurité (MSS) est jugé essentiel pour renforcer les capacités des forces de l’ordre locales et rétablir la stabilité en Haiti. Toutefois, il ne suffira pas de répondre aux préoccupations en matière de sécurité. Le rapport souligne l’importance de mettre en œuvre des politiques globales visant à restaurer l’État de droit, à lutter contre la corruption et à garantir l’obligation de rendre compte des violations des droits de l’homme.
La crise en Haïti a eu un impact profond sur le bien-être des enfants, en exacerbant les taux de malnutrition et en perturbant l’accès à l’éducation. Les résultats récents de l’analyse de la classification intégrée de la phase de sécurité alimentaire (IPC) révèlent une augmentation inquiétante du nombre d’enfants souffrant de malnutrition aiguë sévère, soulignant le besoin urgent d’une intervention pour protéger les plus jeunes citoyens d’Haïti. En outre, les attaques des groupes armés contre les écoles ont privé des milliers d’enfants de leur droit à l’éducation, exacerbant un peu plus la crise humanitaire et perpétuant les cycles de pauvreté et d’instabilité.
Malgré ces défis, les agences de l’ONU restent déterminées à fournir une assistance vitale aux populations les plus vulnérables d’Haïti. Le bureau des affaires humanitaires de l’ONU, OCHA, fait état d’efforts continus pour distribuer des fournitures essentielles telles que de la nourriture, de l’eau et de l’aide médicale aux communautés déplacées. En outre, le Fonds des Nations unies pour l’enfance (UNICEF) continue de fournir des services essentiels, notamment un soutien nutritionnel et des programmes éducatifs, afin d’atténuer l’impact de la crise sur les enfants et les familles.
La crise en Haïti exige des actions urgentes et concertées pour s’attaquer aux causes profondes de l’instabilité et apporter un soutien essentiel au peuple haïtien. Sans une intervention décisive, la situation risque de s’aggraver, entraînant davantage de souffrances, de déplacements et d’instabilité dans la région, avertit le haut-commissaire des Nations unies aux droits de l’homme, Turk Volker.