Visa H-1B : qui doit vraiment payer les 100 000 dollars ? L’agence fédérale précise, les entreprises s’interrogent, les tribunaux saisis

Emmanuel Paul
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Après une période d’incertitude d’un mois, l’administration fédérale responsable des autorisations de travail a finalement apporté les éclaircissements attendus : les frais de 100 000 dollars annoncés en septembre pour le visa H-1B concernent exclusivement les nouvelles demandes soumises pour des personnes résidant hors des États-Unis et ne possédant pas déjà un H-1B. Cette précision, publiée lundi soir sur le portail de l’agence, redéfinit une mesure dont l’application avait initialement été interprétée de façon plus large.

Le communiqué officiel souligne un élément temporel crucial : toute demande déposée depuis le 21 septembre concernant un travailleur ou une travailleuse hors des États-Unis est soumise aux nouveaux frais, devant être acquittés avant la présentation de la demande de visa. L’agence indique également que ces frais s’appliquent lorsqu’une requête soumise après le 21 septembre « demande une notification au consulat, une notification au point d’entrée ou une inspection avant vol pour un étranger se trouvant aux États-Unis ».

En revanche, la directive établit clairement les exemptions : aucun paiement n’est requis lorsqu’une personne déjà présente sur le territoire américain modifie son statut (par exemple, passage d’un visa F-1 étudiant à un H-1B), sans nécessiter l’obtention d’un visa à l’étranger.

Lors de l’annonce initiale, la Maison-Blanche avait déclaré que ces frais s’appliqueraient à tous les nouveaux demandeurs H-1B, avec des dérogations spécifiques pour certains profils ne « posant pas une menace pour la sécurité ou le bien-être » du pays. La publication de l’agence restreint donc le champ d’application tout en maintenant le principe du paiement anticipé.

Le 19 septembre, en présentant la nouvelle doctrine, le président Donald Trump avait défendu une double finalité : « remédier aux abus de ce programme tout en permettant aux entreprises d’embaucher le nec plus ultra des travailleurs étrangers temporaires ». Il avait également accusé certains employeurs d’utiliser cet outil pour tirer vers le bas la rémunération locale en recourant à de la main-d’œuvre étrangère moins payée.

Deux réalités budgétaires pour les employeurs

Pour les employeurs et leurs conseils, la ligne de partage devient lisible :

  • Obligation de paiement pour les recrutements internationaux de candidats résidant à l’étranger souhaitant obtenir un visa H-1B
  • Dispense de paiement pour les modifications de statut sur le territoire américain, notamment pour la conversion courante du visa F-1 vers H-1B dans les milieux universitaires et technologiques

Cette distinction engendre une dualité budgétaire : les coûts d’embauche pour un talent international hors des États-Unis augmentent considérablement, alors que les transitions internes (pour les personnes déjà présentes) conservent leurs conditions financières habituelles. Les départements RH commencent à élaborer des stratégies alternatives : différer les recrutements, favoriser les mobilités internes, délocaliser vers des pôles étrangers ou développer le travail à distance transfrontalier quand les postes le permettent.

Le gouvernement justifie ces frais « dissuasifs » comme un moyen d’inciter les entreprises à privilégier les talents locaux. À brève échéance, certains experts prévoient un léger avantage concurrentiel pour les professionnels américains du secteur technologique, si les projets de recrutement international sont suspendus en raison des coûts élevés.

Néanmoins, des recherches démontrent l’impact bénéfique des talents internationaux. Une étude de 2024 de l’Institut IZA sur l’économie du travail conclut que les titulaires de H-1B « aident les entreprises à accroître leurs effectifs » et que « chaque titulaire H-1B embauché par une entreprise contribue à des gains d’emplois supplémentaires, y compris des embauches nationales ». En substance, l’intégration de compétences spécifiques stimulerait la croissance globale des équipes, incluant les recrutements locaux.

Sur le plan légal, une Chambre de commerce a intenté une action en justice début octobre, contestant la légalité des frais de 100 000 dollars, estimant qu’ils dépassent l’autorité réglementaire et dénaturent l’objectif du programme. Une seconde action juridique, menée par une coalition d’organisations de santé et de syndicats, a été déposée en octobre pour demander la suspension. Les plaignants argumentent que le montant prohibitif des frais compromet l’essence même du dispositif dans les secteurs en tension.

Pour l’administration américaine, l’instrument tarifaire demeure un moyen stratégique de corriger les « déséquilibres » et d’améliorer les salaires locaux en atténuant la pression concurrentielle. La précision administrative, limitant le périmètre à des situations spécifiques (nouvelles entrées internationales, certaines procédures consulaires), cherche à consolider la mesure juridiquement tout en maintenant l’objectif politique initial.

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Source: CBS News

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