Une confrontation juridique majeure se dessine entre le pouvoir judiciaire américain et l’administration Trump après l’expulsion controversée de plusieurs centaines de Vénézuéliens.
Tôt ce lundi, le juge fédéral James Boasberg a demandé au gouvernement de fournir des explications quant à la déportation de 238 ressortissants vénézuéliens, malgré une ordonnance de suspension émise par la justice.
Selon Reuters, ces expulsions concernent des individus accusés d’appartenir au gang Tren de Aragua, un groupe criminel vénézuélien redouté.
La Maison-Blanche a justifié l’opération en s’appuyant sur une législation rarement utilisée, l’Alien Enemies Act de 1798, historiquement appliquée en temps de guerre.
Le juge Boasberg a ordonné une audience lundi à 17 heures (heure de l’Est) pour examiner si les expulsions ont eu lieu avant ou après la diffusion de son ordonnance.
Le journal américain Reuters rapporte que cette décision judiciaire est intervenue à la suite d’une requête déposée par l’American Civil Liberties Union (ACLU) et d’autres organisations de défense des droits.
Dans un document judiciaire, le ministère de la Justice a reconnu que l’ordre du juge est apparu sur le système en ligne des tribunaux à 19 h 26 samedi soir. En réponse, El Salvador, pays où les expulsés ont été envoyés, a diffusé des images montrant leur débarquement. « Oups… trop tard », a ironiquement commenté le président salvadorien Nayib Bukele sur X, anciennement Twitter, selon Reuters.
Face à ces critiques, l’administration Trump a fermement défendu son action.
Dimanche, la porte-parole de la Maison-Blanche, Karoline Leavitt, a nié toute violation de l’ordonnance du juge et a remis en question l’autorité judiciaire dans cette affaire. « Un juge unique dans une seule ville ne peut pas diriger les mouvements d’un avion… rempli d’étrangers terroristes qui ont été physiquement expulsés du sol américain », a-t-elle déclaré, selon Reuters.
L’administration américaine maintient que ces individus représentent une menace sécuritaire et que leur expulsion relève d’une décision exécutive souveraine. Ce positionnement alimente un débat juridique plus large sur la séparation des pouvoirs aux États-Unis et pourrait déboucher sur une crise constitutionnelle où l’exécutif ignore les décisions du pouvoir judiciaire. Des ailes du groupe MAGA au Parlement parlent déjà de la mise en accusation des juges qui sévissent à prendre des décisions contraires à la volonté du gouvernement d’extrême droite des États-Unis.
Les récentes expulsions s’inscrivent dans une tendance plus large de l’administration Trump à contester le rôle du pouvoir judiciaire dans le contrôle de ses décisions. Depuis son arrivée au pouvoir, le président a cherché à étendre les prérogatives de l’exécutif, notamment en matière d’immigration.
Selon Reuters, Tom Homan, conseiller spécial à l’immigration de Trump, a affirmé que les vols avaient déjà quitté le sol américain avant l’ordonnance du juge et que d’autres suivraient. « Une fois que vous êtes hors des frontières, c’est ce que c’est. Mais ils étaient en eaux internationales, proches de l’atterrissage. Vous savez quoi ? Nous avons fait ce qu’il fallait faire », a-t-il déclaré sur Fox News.
Lorsqu’on lui a demandé si ces expulsions allaient continuer, Homan a été catégorique : « Un autre vol, un autre vol chaque jour. Nous ne nous arrêterons pas. Peu importe ce que pensent les juges. »
Ce bras de fer judiciaire met en lumière les tensions croissantes entre l’administration Trump et les tribunaux fédéraux. Dans plusieurs affaires, des organisations de défense des droits ont accusé le gouvernement de ne pas respecter les décisions judiciaires.
Avec un Congrès largement acquis aux décisions du président, la justice est l’un des derniers contre-pouvoirs en mesure de limiter l’exécutif. L’issue de cette bataille pourrait donc avoir des implications profondes sur la séparation des pouvoirs aux États-Unis et sur la manière dont le gouvernement applique les lois sur l’immigration.