Trois employés du Allston Car Wash libérés de la détention de l’ICE deux semaines après une intervention fédérale

Emmanuel Paul
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Emmanuel Paul
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Emmanuel Paul est un journaliste chevronné et un conteur accompli, animé par un engagement profond envers la vérité, la communauté et l’impact social. Il est le...

Deux semaines après une intervention de l’Agence américaine de l’immigration (ICE) dans une station de lavage de voitures à Boston, trois des neuf travailleurs immigrants interpellés ont été remis en liberté, selon leur avocat.

Cette libération partielle survient après une période d’attente qualifiée de « frustrante et douloureuse » pour les familles touchées.

Le 4 novembre, une opération fédérale menée dans un car wash du quartier d’Allston s’était soldée par l’interpellation de neuf employés immigrants. Depuis lors, leurs proches et leurs représentants légaux tentaient d’obtenir des informations sur leur lieu de détention et leur situation juridique, avec peu de résultats.

Mardi soir, l’avocat spécialisé en immigration Todd Pomerleau, qui défend les neuf travailleurs, a annoncé à la chaîne NBC10 Boston que trois d’entre eux avaient recouvré leur liberté et pouvaient retrouver leurs proches.

D’après l’avocat, ces trois employés – Yuli Mendez Luarca, 45 ans, originaire du Guatemala, Dairo Preciado, 67 ans, de Colombie, et Jose Enriquez Sagastume, 20 ans, du Honduras – ont bénéficié d’une libération sous caution lundi, suite au dépôt d’une requête urgente.

« Ils ont été libérés après que j’ai déposé une requête d’urgence », a expliqué Todd Pomerleau, évoquant une procédure caractérisée par le manque de transparence de l’ICE.

Opacité et difficultés de communication avec l’ICE

Depuis l’intervention, l’avocat indique avoir fait face à de nombreux obstacles dans ses échanges avec l’agence fédérale. Il affirme qu’Immigration and Customs Enforcement a dissimulé des informations cruciales concernant la situation et la localisation de ses clients.

« Ils n’étaient pas autorisés à nous parler. Nous avons envoyé des courriels qui sont restés sans réponse, nous avons appelé. Ils ne répondent pas au téléphone. Ce n’était pas comme ça avant », a déploré Pomerleau.

Il remet également en question le respect des droits fondamentaux dans ces procédures.

« La norme, c’est que la Constitution est violée sept jours sur sept », a-t-il déclaré, soulignant une dégradation progressive de la situation au fil des années.

Selon NBC10 Boston, jusqu’à mardi soir, l’ICE n’avait toujours pas répondu aux sollicitations de la chaîne concernant la situation des employés du Allston Car Wash.

« Une incertitude totale » dénoncée par un autre avocat

Les observations de Pomerleau trouvent écho auprès d’autres spécialistes du droit de l’immigration. Jonatas Silva, également avocat en immigration qui se rend fréquemment au centre de détention de l’ICE à Burlington (Massachusetts), a confirmé l’atmosphère d’arbitraire et de désorganisation qui caractérise selon lui ces procédures.

« Il n’y a aucune logique, aucune cohérence. Je pense que c’est le plus gros problème, c’est l’incertitude », a-t-il expliqué.

Bien que n’étant pas directement impliqué dans l’affaire du Allston Car Wash, Me Silva considère que le système est intentionnellement complexifié :

« Ils rendent le processus plus difficile pour aider les gens, ça ne fait que stresser davantage les personnes concernées. Je pense que tout cela est voulu pour que les gens renoncent. C’est une tactique de peur », a-t-il dénoncé.

Des familles brisées dans l’attente d’audiences

Au-delà des statistiques et des procédures administratives, ce sont des familles entières qui se retrouvent bouleversées brutalement. C’est notamment le cas de Jose Vasquez, citoyen salvadorien. Sa fille, son épouse et son beau-frère font partie des personnes appréhendées lors de l’intervention de l’ICE au car wash d’Allston.

Vasquez a confié à NBC10 Boston sa stupéfaction d’avoir assisté, sans pouvoir intervenir, à l’arrestation de ses proches alors qu’il était simplement venu leur apporter du café le 4 novembre. Il témoigne aujourd’hui vivre dans un mélange d’anxiété et d’espoir, tout en s’efforçant d’obtenir des informations précises sur le sort de sa famille.

Selon lui, sa fille possédait effectivement un permis de travail valide, mais n’a pas été en mesure de le présenter lors de son interpellation. Son épouse, qui ne dispose pas d’un tel permis, doit comparaître à une audience de mise en liberté sous caution dans les prochains jours, qui déterminera la possibilité de sa libération pendant le traitement de sa procédure d’immigration.

Un climat de peur autour de l’application des lois migratoires

Cette situation s’inscrit dans un contexte de durcissement apparent de l’application des lois sur l’immigration aux États-Unis, particulièrement dans les lieux de travail où les employés au statut précaire ou à la situation administrative complexe se trouvent spécialement exposés.

Les interventions de l’ICE dans les établissements, comme celle du car wash d’Allston, génèrent une atmosphère d’inquiétude au sein des communautés immigrées, touchant même les personnes en situation régulière qui redoutent d’être impliquées dans ces opérations d’envergure.

Pour les défenseurs des droits des migrants et leurs avocats, l’opacité concernant les lieux de détention, les modalités de contact avec les familles et les conseils juridiques, ainsi que la difficulté d’accès aux informations, s’inscrivent dans une stratégie visant à décourager les recours légaux et à inciter certains à accepter leur expulsion ou à abandonner leur défense.

Une bataille juridique qui se poursuit pour les six autres travailleurs

Si la libération des ressortissants guatémaltèque, colombien et hondurien apporte un certain réconfort, le combat juridique continue pour les six autres employés du Allston Car Wash toujours en détention.

Me Pomerleau, avocat des neuf travailleurs concernés, a confirmé qu’il maintiendra ses efforts pour obtenir leur libération et garantir le respect de leurs droits constitutionnels et procéduraux. Les prochaines étapes devraient comprendre de nouvelles requêtes en urgence, des audiences de mise en liberté sous caution et des recours contestant les conditions de leur arrestation et de leur détention.

Pendant ce temps, les familles, les collègues et la communauté locale maintiennent leur mobilisation, espérant voir les neuf travailleurs retrouver leurs proches. Comme l’a souligné l’un des avocats interrogés par NBC10 Boston, la principale préoccupation demeure « l’incertitude », une incertitude qui ne pèse pas seulement sur le destin de ces travailleurs, mais aussi sur celui de nombreuses personnes prises dans les rouages du système migratoire fédéral.

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