Surveillance de masse : l’ICE relance l’achat de données sensibles sous l’administration Trump

Darbouze Figaro

De nouveaux documents indiquent que l’Immigration and Customs Enforcement (ICE) cherche à acquérir des technologies de surveillance capables de suivre des centaines de millions de téléphones portables et d’analyser des données issues du dark web.

Parmi les outils convoités figurent des systèmes avancés de reconnaissance faciale et l’exploitation massive de données de géolocalisation provenant de terminaux mobiles.

Un produit phare, Tangles, agrège automatiquement des informations issues de multiples canaux — communications en ligne, données de localisation, dossiers financiers et renseignements open source. Selon des documents de marchés publics consultés par Forbes, l’outil a été développé à l’origine par la société israélienne Cobwebs, fondée par un ancien membre des services de cyberrenseignement.

Cobwebs a été bannie des plateformes de Meta en 2021 pour avoir utilisé des comptes Facebook et WhatsApp afin de surveiller des militants à Hong Kong et au Mexique.

L’entreprise a fusionné en 2023 avec PenLink, désormais partenaire de l’ICE, a rapporté  The Independent qui indique avoir sollicité des commentaires auprès de l’agence et de PenLink, sans réponse.

Un autre logiciel mentionné est Venntel, accusé en 2024 par la Federal Trade Commission (FTC) d’avoir « illégalement suivi et vendu » des données sensibles, y compris des informations relatives à des visites dans des hôpitaux ou des lieux de culte.

Sous la présidence de Joe Biden, le Department of Homeland Security (DHS) avait officiellement mis fin aux achats de données de localisation, après qu’un rapport de l’inspecteur général a conclu à des violations de la loi.

« L’administration Biden avait fermé la porte à ces pratiques », rappelle le sénateur Ron Wyden, cité par The Independent. « Chaque Américain devrait être préoccupé par le fait que la force de sécurité choisie par Trump rachète et utilise des données de localisation sans mandat », a t-il fait savoir.

En 2023, l’ICE et le service des douanes douanes (CBP) avaient affirmé cesser l’usage de ces informations, et la Chambre des représentants avait adopté le Fourth Amendment Is Not For Sale Act, interdisant l’achat de données par le gouvernement sans mandat judiciaire.

Depuis janvier 2025, l’administration Trump a inversé la tendance. Dans le cadre d’une campagne d’expulsions de grande ampleur et d’un financement accru des agences migratoires, l’ICE multiplie les contrats de surveillance, y compris avec des entreprises de cybersécurité controversées.

L’expansion ne se limite pas aux solutions privées.

Des accords auraient été conclus entre l’ICE et d’autres agences fédérales pour obtenir des données fiscales et médicales.

L’agence aurait désormais accès à des informations issues de l’Internal Revenue Service (IRS) et de Medicaid, selon plusieurs enquêtes de presse.

Pour Ben Bell, avocat au « Constitution Project », cette accumulation de capacités de surveillance crée un climat préoccupant : « Cela fait partie d’un schéma beaucoup plus large dans lequel l’ICE cherche à collecter tout ce qu’elle peut. Même si cela implique de récupérer des données sur des citoyens américains, ce qui dépasse largement sa mission officielle. »

Il met en garde contre les dérives potentielles : « Le danger est accru par les progrès récents en intelligence artificielle, par l’expansion massive de la surveillance de l’ICE et par la volonté de cette administration de qualifier les opposants idéologiques et les manifestants de menaces terroristes intérieures. »

Cette orientation alimente les craintes d’une surveillance généralisée, bien au-delà de la lutte contre l’immigration irrégulière.

Pour les défenseurs des libertés civiles, l’affaire constitue un test majeur : déterminer jusqu’où une administration peut aller dans l’acquisition de données privées en l’absence de contrôle judiciaire.

https://ctninfo.com/fr/?p=37303&preview=true

https://x.com/CtNinfo/status/1973835814397177885

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