À la veille de l’ouverture de la session annuelle de l’Assemblée générale des Nations unies, Londres, Ottawa et Canberra ont procédé, de façon presque simultanée, à la reconnaissance officielle d’un État palestinien. Lisbonne a emboîté le pas quelques heures après.
Cette initiative coordonnée, s’étendant sur trois continents, accentue l’isolement diplomatique d’Israël et met à l’épreuve la relation de ces pays alliés avec l’administration Trump, selon le New York Times.
Dans une allocution vidéo, le Premier ministre britannique Keir Starmer a expliqué cette décision historique : « L’espoir d’une solution à deux États s’estompe, mais nous ne pouvons pas laisser cette lumière s’éteindre. (…) Aujourd’hui, pour raviver l’espoir de la paix et d’une solution à deux États, je déclare clairement, en tant que Premier ministre de ce grand pays, que le Royaume-Uni reconnaît officiellement l’État de Palestine. »
Le Canada et l’Australie ont suivi avec des déclarations similaires. À New York, le chef de la diplomatie portugaise Paulo Rangel a insisté que la solution à deux États est « la seule voie vers une paix juste et durable« , comme le rapporte le New York Times.
Cette vague de reconnaissance survient alors que la France s’est engagée à voter en faveur de la reconnaissance à l’ONU cette semaine, rejoignant ainsi « quelque 150 membres » qui ont déjà franchi ce pas, indique le NYT.
Au Canada, le Premier ministre Mark Carney a reproché au gouvernement israélien de « travailler méthodiquement pour empêcher qu’un État palestinien puisse jamais voir le jour. » En Australie, le Premier ministre Anthony Albanese a souligné que la solution à deux États a « toujours été la seule voie vers une paix et une sécurité durables pour les peuples israélien et palestinien. »
Ces décisions positionnent explicitement trois alliés de Washington en opposition avec la ligne de la Maison-Blanche, observe le NYT, alors que la crise humanitaire à Gaza demeure au centre des préoccupations diplomatiques.
Le Premier ministre israélien Benjamín Netanyahou a condamné ces reconnaissances: « J’ai un message clair pour les dirigeants qui reconnaissent un État palestinien après le terrible massacre du 7 octobre: vous offrez une immense récompense au terrorisme. Et j’ai un autre message: cela n’arrivera pas. Un État palestinien ne sera pas établi à l’ouest du Jourdain. »
Le New York Times note que ces déclarations « approfondissent l’isolement diplomatique » d’Israël, tout en précisant que cela ne va pas changer immédiatement la situation concrète: la reconnaissance demeure un geste symbolique en faveur de l’autodétermination palestinienne, alors que la perspective d’un État viable reste, selon le quotidien, plus éloignée que jamais.
Du côté palestinien, la présidence de l’Autorité palestinienne a accueilli favorablement la position britannique, la considérant comme « une étape importante et nécessaire vers une paix juste et durable« . Le responsable du Hamas Husam Badran a qualifié l’initiative de « pas dans la bonne direction« , « même si elle arrive tard. »
Le NYT souligne cependant que Londres compte écarter toute participation du Hamas dans une future administration ou force de sécurité palestinienne — une condition rejetée par le mouvement islamiste, rapporte le journal.
Pression publique, droits humains et ventes d’armes: les angles morts.
Le New York Times évoque une pression grandissante au sein du Parti travailliste et de l’opinion publique britannique, alimentée par les images incessantes montrant la souffrance des civils à Gaza.
Néanmoins, les voix critiques considèrent que les mesures gouvernementales restent insuffisantes: le gouvernement britannique s’est abstenu de qualifier les actions israéliennes à Gaza de génocide, malgré les appels pressants des députés travaillistes et des spécialistes.
Concernant les exportations militaires, bien que le Royaume-Uni ait interrompu certaines livraisons d’armement à Israël, il maintient la fourniture de pièces pour les F-35 employés dans les bombardements, note le NYT. Le 10 Downing Street a par ailleurs imposé des sanctions aux ministres d’extrême droite Itamar Ben-Gvir et Bezalel Smotrich, et indiqué qu’il respecterait ses « obligations légales » si Benjamín Netanyahou — sous le coup d’un mandat de la CPI — se rendait au Royaume-Uni (NYT).
Selon Daniel Levy, ancien négociateur israélien dirigeant le U.S./Middle East Project, cité par le NYT, cette position britannique ne suffira pas à réorienter le cours du conflit: « Le gouvernement britannique espérera que cela lui achète une période prolongée d’accalmie sans avoir à aller plus loin. (…) Mais si les actions d’Israël restent aussi flagrantes et agressives que c’est le cas, il est peu probable que cela tienne. »
Ces prises de position n’arrêtent pas à elles seules l’offensive israélienne ni ne changent le rapport de force militaire. Elles constituent cependant un virage diplomatique: des alliés majeurs des États-Unis jugent désormais que l’abandon du projet des deux États est plus dommageable que d’affronter Washington et Jérusalem, souligne le New-York Times.
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Source: New York Times