La police du Mississippi signale un père de famille à l’ICE après une simple amende pour dépôt d’ordures

Emmanuel Paul
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Emmanuel Paul
Journalist/ Storyteller
Emmanuel Paul est un journaliste chevronné et un conteur accompli, animé par un engagement profond envers la vérité, la communauté et l’impact social. Il est le...

Un père de famille dans le Mississippi risque la déportation après avoir été rapporté par la police locale du Mississippi. Son seul crime : une amende pour dépôt d’ordures.

Kerlin Moreno-Orellana, ouvrier du bâtiment et père de quatre enfants, risque aujourd’hui l’expulsion des États-Unis après avoir été interpellé à Jackson pour un simple délit mineur : un dépôt illégal supposé. Une infraction qui, selon les avocats, se solde habituellement par une simple amende.

Le 16 juin dernier, Moreno-Orellana se trouvait avec son employeuse, Christy Parker, dans un quartier du sud de Jackson pour visiter un bien immobilier abandonné.
Tous deux ont été arrêtés par la police locale, accusés de dépôt sauvage d’ordures. Selon Parker, aucune infraction n’a été commise : « On n’a rien jeté, rien déposé. » Pourtant, la police a contacté une chaîne locale, 16 WAPT, pour filmer leur interpellation, une pratique que le service justifie par la volonté de « dissuader » d’autres infractions.

Mais l’affaire a brusquement pris une autre tournure : après l’arrestation, la police de Jackson a alerté les services fédéraux de l’immigration (ICE). Si Parker a été relâchée quelques heures plus tard, Moreno-Orellana, qui disposait pourtant d’un permis de travail, a été maintenu en détention, puis transféré dans un centre ICE en Louisiane.

« Il n’a rien fait de plus que moi. Mais moi je suis blanche… et je suis ici », a déclaré Parker à Mississippi Today.

Le lendemain, un juge municipal a ordonné la libération du père de famille. Mais l’ICE avait entre-temps émis un « detainer », une demande de maintien en détention le temps d’examiner son dossier migratoire. Ce type de requête, qui n’est pas un mandat d’arrêt, est pourtant automatiquement exécuté dans le Mississippi depuis une loi de 2016 imposant aux autorités locales de coopérer avec l’ICE, a fait remarquer Mississippi Today.

Le shérif du comté de Hinds, Tyree Jones, a confirmé à Mississippi Today qu’aucune procédure n’avait dérogé à la norme : « Ce que nous faisons aujourd’hui, c’est ce que nous avons toujours fait. »

Mais selon Me Jeremy Litton, avocat spécialisé en immigration dans l’État, le fait que la police de Jackson appelle elle-même l’ICE est plus récent. D’habitude, ce sont les services de détention qui signalent les cas, pas les policiers de terrain.

Moreno-Orellana, 35 ans, vivait au Mississippi depuis plus de 16 ans. Il avait déjà eu affaire à l’immigration en 2019, après une arrestation pour excès de vitesse et conduite sans permis. Il avait alors passé plus d’un mois en centre de rétention.

Cette fois, l’ICE justifie sa détention en avançant qu’il aurait enfreint les conditions d’une précédente libération sous caution. « Ce type d’infraction ne devrait pourtant pas suffire à justifier une expulsion, surtout quand la personne a un permis de travail », a estimé Matt Steffey, professeur à la faculté de droit du Mississippi College. Il y voit une conséquence directe du climat politique : « Cela ressemble à un effet de la pression croissante exercée par l’administration Trump sur les expulsions. »

L’homme, originaire du Honduras, était le seul soutien financier de sa famille. Son épouse, restée au foyer pour s’occuper des enfants, dit être désemparée. « J’ai toujours été là pour mes enfants. Lui, c’était celui qui ramenait à manger. Je ne pense pas à moi, mais à eux. Ils ont besoin de leur père », a-t-elle confié en espagnol à Mississippi Today.

Les amis et collègues de Monsieur Moreno-Orellana le décrivent comme un homme discret et travailleur. « Il rentrait du boulot, et c’est tout. Il ne refusait jamais d’aider quelqu’un », a résumé Parker.

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