Les États-Unis veulent réorganiser la MSS en Haïti et réduire le rôle du Kenya

Darbouze Figaro

Les États-Unis élaborent un plan pour une refonte majeure de la réponse internationale à la violence des gangs qui paralyse Haïti, proposant de doubler la taille de la force de sécurité et de retirer le leadership stratégique au Kenya au profit d’un autre pays, selon des déclarations officielles et des sources diplomatiques.

L’annonce a été faite mercredi lors d’une réunion de l’Organisation des États américains (OEA) à Washington, où les diplomates ont également été informés d’une ambitieuse feuille de route de 2,6 milliards de dollars sur trois ans pour stabiliser le pays le plus pauvre des Amériques.

Kimberly J. Penland, cheffe adjointe de mission des États-Unis, dont les propos ont été rapportés dans un long article de la journaliste Jacqueline Charles du Miami Herald, a déclaré que son pays rédigeait une résolution pour le Conseil de sécurité des Nations unies visant à « financer adéquatement » la lutte contre les gangs qui contrôlent une grande partie de la capitale haïtienne, Port-au-Prince. Cette proposition s’inspire des recommandations du secrétaire général de l’ONU, António Guterres, pour utiliser les fonds des opérations de paix.

« Si le Conseil de sécurité de l’ONU poursuit ce modèle, nous rechercherons également une participation régionale solide pour assurer le leadership stratégique de la force », a déclaré Mme Penland, sans entrer dans les détails. Ces précisions, confirmant un changement de cap concernant le Kenya, ont ensuite été partagées avec le Miami Herald par une source au courant des discussions aux Nations unies.

Cette réorientation intervient alors que le déploiement tant attendu de policiers kenyans, débuté en juin après des mois de retards, continue de faire face à d’importants défis, allant du manque d’équipement à l’incapacité de renforcer ses effectifs sur le terrain.

Mme Penland a toutefois tenu à remercier le Kenya « pour son dévouement, son leadership et son soutien au cours de l’année écoulée », saluant son courage pour avoir répondu à l’appel d’Haïti « à un moment critique ».

La révélation du plan américano-panaméen est intervenue lors d’une présentation par le secrétaire général de l’OEA, Albert Ramdin, de sa feuille de route révisée pour Haïti. Celle-ci prévoit un investissement de 1,33 milliard de dollars pour reconstruire la police nationale, réformer la justice et démanteler les réseaux criminels transnationaux.

« Cela s’étend sur une période de 34 à 36 mois », a précisé M. Ramdin. « Nous espérons qu’après 36 mois, la situation sécuritaire sera raisonnablement sous contrôle. »

Il a insisté sur le fait que ce plan n’était pas une dictature mais un cadre logique nécessitant la collaboration de tous les acteurs. « Aucun acteur ni donateur ne peut résoudre la crise seul », a-t-il affirmé.

La proposition des États-Unis se heurtera à plusieurs obstacles. Même si le Conseil de sécurité approuve un nouveau mandat, Washington devra trouver 5 000 personnels, un objectif ambitieux alors que la mission actuelle peine à atteindre son plafond initial de 2 500.

Le financement reste également un problème crucial. Un fonds d’affectation spéciale de l’ONU destiné à la mission actuelle n’a recueilli que 112,5 millions de dollars. Si les États-Unis ont alloué plus de 835 millions de dollars en soutien divers, aucun pays d’Amérique latine ou des Caraïbes n’a contribué au fonds onusien.

L’engagement régional faiblit même : la Jamaïque n’a qu’une vingtaine de personnels, les Bahamas et le Belize ont réduit leurs effectifs, et la Barbade a annulé son envoi de troupes.

L’urgence sécuritaire a été unanimement soulignée lors de la réunion. Le représentant haïtien par intérim, Jean Josué Pierre, a cité le président du Conseil présidentiel de transition, Laurent Saint-Cyr : la sécurité est la seule attente des 12 millions d’Haïtiens.

« Sans cela, tout le reste s’effondrera, la reconstruction constitutionnelle, la reconstruction économique, les élections », a-t-il déclaré.

Kimberly Penland a abondé dans ce sens, soulignant que la reconquête du territoire et la sécurisation des axes de circulation étaient des « conditions préalables essentielles » aux élections et à l’aide humanitaire.

« La prochaine force internationale doit disposer des ressources nécessaires pour contrôler le territoire, sécuriser les infrastructures et compléter la police nationale haïtienne », a-t-elle insisté.

Alors que l’OEA tente de se positionner comme un acteur central sans « empiéter sur la souveraineté haïtienne », le succès de ces nouveaux plans dépendra de leur capacité à surmonter les défis du financement, du recrutement et de la coordination internationale qui ont jusqu’à présent entravé les efforts.

https://ctninfo.com/fr/les-etats-unis-veulent-reorganiser-la-mss-en-haiti-et-reduire-le-role-du-kenya/

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