Un climat d’incertitude s’installe parmi des milliers de bénéficiaires du programme humanitaire de liberté conditionnelle, après que l’administration Trump a décidé de suspendre ce dispositif instauré sous le mandat du président Biden.
Dans une interview accordée à KTVU Fox San Francisco, George Duany, ancien directeur de l’Institut de recherche cubaine à la Florida International University, a livré son analyse sur cette volte-face politique et ses implications pour les communautés cubaines et vénézuéliennes aux États-Unis.
« Beaucoup de Cubano-Américains ont soutenu le président Trump, mais aujourd’hui, ils sont déçus. » Personne n’avait imaginé que les Cubains aux États-Unis feraient l’objet de déportation, a regretté George Duany lors de son interview sur KTVU Fox 2 San Francisco.
Selon le chercheur, le revirement de la Maison-Blanche touche de plein fouet une population historiquement fidèle au Parti républicain.
Un sondage récent mené par la Florida International University révèle que 68 % des Américains d’origine cubaine avaient exprimé leur intention de voter pour Donald Trump. Toutefois, l’abrogation du programme de libération conditionnelle humanitaire — qui a permis à plus de 110 000 Cubains d’entrer légalement aux États-Unis — a provoqué une onde de choc dans cette communauté.
Depuis la guerre froide, les Cubains qui réussissaient à atteindre le sol américain, souvent par mer, bénéficiaient d’un traitement préférentiel. La loi d’ajustement cubain de 1966 leur permettait d’obtenir une carte verte après un an et un jour de présence. Mais aujourd’hui, cet acquis semble menacé.
« Leurs droits et leurs avantages sont désormais remis en cause », a précisé Duany, soulignant que nombre d’entre eux pourraient se retrouver sans statut ou contraints de vivre en situation irrégulière.
L’inquiétude est d’autant plus grande que des élus cubano-américains du Congrès, traditionnellement proches de ces communautés, soutiennent les nouvelles mesures d’expulsion, en particulier à l’encontre de personnes suspectées d’avoir gardé des liens avec le gouvernement communiste cubain. Une position qui divise.
« La majorité des Cubano-Américains sont satisfaits de voir des personnes liées au régime de La Havane être expulsées. Mais beaucoup d’autres, sans casier judiciaire, risquent aussi l’expulsion », a nuancé Duany, qui a également évoqué le cas des Vénézuéliens, eux aussi concernés.
La Floride, et particulièrement la ville de Doral, compte une forte concentration de ressortissants originaires du Venezuela. L’annonce de la révocation progressive de leur statut de protection temporaire (TPS) a provoqué un choc similaire.
« Il y a de la peur et de l’anxiété dans la communauté vénézuélienne », a témoigné George Duany.
Pour ces exilés, souvent en opposition ouverte avec le régime de Nicolás Maduro, retourner au Venezuela représente un danger réel. Comme chez les Cubains, cette décision pousse certains Vénézuéliens à reconsidérer leurs choix électoraux, bien qu’il soit encore trop tôt pour mesurer un éventuel basculement politique.
« Comme les Cubains, de nombreux Vénézuéliens réévaluent leur préférence de vote », a confié Duany.
Si les électeurs d’origine cubaine et vénézuélienne ont massivement soutenu Donald Trump lors de la dernière élection, cette série de décisions pourrait ébranler cette alliance politique.
Le programme de libération conditionnelle humanitaire avait représenté, pour beaucoup, un espoir d’intégration stable. Sa suspension, combinée à des menaces d’expulsion, est perçue comme une trahison par une partie de ces communautés.
Depuis son retour à la Maison-Blanche, Donald Trump a fait de la déportation des immigrants, particulièrement ceux en provenance d’Amérique centrale et des Caraïbes, sa principale priorité. Les Cubains, qui étaient jusque-là épargnés par les différentes administrations, font maintenant partie des groupes ciblés.
Les mois à venir seront cruciaux pour évaluer l’impact électoral de ces mesures et l’éventuelle remise en question du soutien cubano- et vénézuélo-américain à l’administration actuelle.
Source : Interview diffusée sur KTVU Fox San Francisco, 27 mai 2025.