Le Département de la Sécurité intérieure (DHS) a publié un projet de règle qui élargirait de façon notable la collecte et l’usage de données biométriques — y compris les empreintes, l’imagerie faciale, l’iris, les empreintes de paume, la voix et, dans certains cas, l’ADN — pour un ensemble beaucoup plus vaste de personnes impliquées dans des démarches d’immigration.
Le texte, inscrit au Federal Register, n’est pas encore final et fait l’objet d’une consultation publique jusqu’au 2 janvier 2026.
Selon le pré-projet, l’obligation de fournir des biométries s’appliquerait à toute personne « déposant ou associée » à une demande d’avantage migratoire, « sans considération d’âge ». Autrement dit, le DHS veut pouvoir solliciter ces données auprès d’enfants comme d’adultes, y compris de citoyens américains qui signent ou parrainent un dossier (sponsors, co-demandeurs, signataires). Le texte précise que le DHS « propose d’exiger la soumission de données biométriques par toute personne […] quel que soit son âge », une formulation inédite à ce niveau de généralité.
Dans le détail, la proposition redéfinit le terme « biométrie » pour y inclure des caractéristiques « anatomiques, physiologiques ou comportementales » et dresse une liste indicative : imagerie faciale, empreintes digitales et de paume, signature manuscrite, imagerie oculaire (iris), empreintes vocales et ADN. Elle officialise aussi l’usage et la réutilisation des biométries à des fins de vérification d’identité, d’enquêtes de sécurité et de production de titres sécurisés. « Le DHS propose de définir [la] biométrie » de manière suffisamment large pour intégrer de nouvelles technologies à mesure qu’elles émergent, résume la presse spécialisée.
Le ministère avance plusieurs objectifs : renforcer la vérification d’identité, lutter contre la fraude, protéger les enfants contre la traite et améliorer la sécurité nationale. Mais l’ampleur du dispositif soulève des interrogations sur la vie privée et la proportionnalité. Le média Nextgov note que la règle permettrait pour la première fois à CBP et ICE de collecter des biométries auprès d’enfants de moins de 14 ans, ce qui étend nettement le périmètre actuel des pratiques.
Un contrôle continu jusqu’à la citoyenneté
Autre pivot du texte : la mise en place d’un « contrôle continu » du statut des personnes sur la durée de leur présence aux États-Unis. Comme le résume le cabinet Ogletree Deakins, le DHS « prévoit de mettre en œuvre une vérification d’immigration continue », ce qui pourrait se traduire par des soumissions répétées de données biométriques jusqu’à l’obtention de la citoyenneté. Cette surveillance au long cours s’ajouterait aux vérifications ponctuelles existantes lorsque des éléments nouveaux apparaissent dans un dossier.
Le projet élargit aussi l’autorité de l’administration en matière d’ADN. Le DHS se verrait reconnaître la faculté de « requérir, demander ou accepter » des échantillons ou résultats d’ADN pour établir des liens de filiation ou le sexe biologique lorsque ces éléments conditionnent l’éligibilité à un bénéfice migratoire. Des commentateurs mettent toutefois en garde contre la sensibilité de ces données et les enjeux de sécurité et de gouvernance qu’elles impliquent.
La proposition ne viserait pas seulement les demandeurs étrangers. Les signataires d’entreprises qui parrainent des candidats (pétitionnaires, responsables RH ou juridiques) pourraient eux aussi être soumis à des obligations biométriques, une rupture par rapport à la pratique courante où seuls les ressortissants étrangers fournissent ces données. Des cabinets d’immigration avertissent que cette extension pourrait signifier des rendez-vous supplémentaires et des délais accrus dans certaines filières (H-1B, L-1, EB), avec des coûts administratifs additionnels.
Un mouvement réglementaire plus large
Le projet s’inscrit dans une séquence où le DHS ajuste plusieurs cadres relatifs à l’identité et aux frontières. Fin octobre, une règle finale distincte a déjà autorisé le DHS à photographier tous les non-citoyens à l’entrée et à la sortie du territoire et à collecter, selon les cas, d’autres biométries, en supprimant les références à des programmes pilotes. Cette mesure, bien que séparée du NPRM sur l’USCIS, éclaire l’orientation générale de l’agence vers une généralisation des technologies biométriques.
Le dossier avance selon la procédure classique de réglementation : publication au Federal Register, appel à commentaires, puis rédaction de la règle finale après examen des contributions. L’Association américaine des avocats en immigration (AILA) rappelle que les observations du public sont attendues jusqu’au 2 janvier 2026 et invite les parties prenantes à signaler les effets possibles sur la confidentialité, l’accès aux droits et les charges opérationnelles.
Pour les praticiens et les familles, les zones à surveiller sont multiples : l’étendue exacte de la définition des personnes « associées » à une demande (pouvant inclure des citoyens américains), le cadre de conservation des données, les conditions de réutilisation des biométries déjà collectées et les modalités concrètes du contrôle continu. Des notes d’experts (Fragomen, BAL) soulignent que la portée cumulative de ces éléments pourrait reconfigurer l’expérience utilisateur des plateformes d’immigration (prises de rendez-vous, délais, coûts).
Ce qu’il faut retenir
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- Collecte élargie : Le DHS propose d’imposer la collecte de biométries à toute personne liée à une procédure d’immigration, sans limite d’âge, avec une définition élargie des modalités (visage, empreintes, paumes, iris, voix, signature, ADN).
- Contrôle continu : Le texte prévoit un contrôle continu du statut des personnes, pouvant impliquer des soumissions répétées jusqu’à la naturalisation.
- Impact sur les employeurs : Les employeurs-pétitionnaires et leurs signataires pourraient devoir fournir leurs propres biométries, ce qui modifierait les pratiques actuelles et risque d’allonger certains délais.
- Consultation publique : La consultation publique est ouverte jusqu’au 2 janvier 2026 ; la règle n’est pas encore en vigueur.

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Source:The Register


