Un responsable d’Azure College, propriété de l’homme d’affaires Johnson Napoléon, dans le collimateur de la justice américaine.
En effet, José Napoleon, frère de Johnson Napoléon et directeur des admissions d’Azure College, a été formellement inculpé pour son implication présumée dans un vaste réseau de vente de diplômes frauduleux en soins infirmiers. Onze autres personnes ont également été mises en cause par le ministère américain de la Justice.
Le DOJ a confirmé ces poursuites lundi dans un communiqué officiel, soulignant que cette deuxième phase du dossier vise à démanteler un système ayant généré près de 7 300 faux diplômes.
Selon l’acte d’accusation déposé devant la cour fédérale du district sud de la Floride (Southern District of Florida), José Napoleon, 40 ans, domicilié dans le comté de Palm Beach, est poursuivi pour complot en vue de commettre une fraude électronique (conspiracy to commit wire fraud).
« Napoleon était directeur des admissions pour Azure College, Inc., basé à Fort Lauderdale. L’établissement proposait des programmes en soins infirmiers pratiques, un diplôme associé en sciences infirmières, ainsi qu’un parcours menant du diplôme d’infirmier enregistré au baccalauréat en sciences infirmières (RN to BSN) », précise le communiqué du Département de la Justice.
S’il est reconnu coupable, Napoleon risque jusqu’à 20 ans de prison.
Johanah Napoleon, la sœur de Johnson Napoléon, a déjà été condamnée en juillet 2023 à 21 mois de prison dans une affaire similaire.
Il faut toutefois noter que Johnson Napoléon, le fondateur d’Azure College, n’a pas été mentionné dans le communiqué du ministère de la Justice.
Un réseau de fraude systématique
Les procureurs fédéraux décrivent un système bien rodé : plusieurs écoles privées de Floride, autrefois agréées pour délivrer des diplômes en soins infirmiers, auraient vendu à des centaines de candidats des relevés de notes et diplômes falsifiés.
Ces documents donnaient un accès direct à l’examen national de licence des infirmiers, le National Council Licensure Examination (NCLEX).
« Les acheteurs de ces documents falsifiés utilisaient ces diplômes pour se présenter à l’examen NCLEX. En cas de réussite, ils devenaient éligibles à une licence professionnelle dans différents États, obtenaient ensuite un emploi comme infirmier, et touchaient salaires et avantages sur la base de qualifications frauduleuses », souligne le communiqué du DOJ.
Ce mécanisme compromettait directement la mission des conseils de régulation en santé publique. Le ministère rappelle que l’octroi du diplôme et de la licence vise avant tout à « protéger le public contre les risques liés à des soins infirmiers dispensés par des personnes non qualifiées », a ajouté le communiqué du DOJ.
Des institutions impliquées et des condamnations déjà prononcées
Cette nouvelle vague d’inculpations fait suite à une première série d’arrestations en 2023. « Dans la Phase I de l’opération Nightingale, 30 accusés, dont plusieurs Haïtiens d’origine, ont été inculpés et/ou condamnés à la suite d’accords de plaider-coupable ou de procès », rappelle le DOJ.
Plusieurs écoles sont mentionnées dans la Phase II :
Azure College (Fort Lauderdale), où travaillait José Napoleon.
Techni-Pro Institute LLC, dirigé par Gilbert Hyppolite, 73 ans, de Palm Beach County.
Agape Academy of Sciences LLC, gérée par Irene Matthews, 55 ans.
Med-Life Institute, fondée par Lemuel Pierre, 56 ans, à Lauderdale Lakes, Kissimmee et Naples.
Carleen Home Health School, dirigée par Carleen Noreus, 51 ans, inculpée pour fraude et blanchiment d’argent.
Ideal Professional Institute, administré par Joel Lubin, 51 ans.
Par ailleurs, Herline Lochard, 46 ans, a déjà plaidé coupable et a été condamnée le 31 juillet à 13 mois de prison suivis de trois ans de liberté surveillée.
Les enquêteurs rappellent que le système frauduleux a eu des répercussions bien au-delà de la Floride.
Grâce au Nurse Licensure Compact, un accord adopté par 43 États, les bénéficiaires de licences obtenues de manière frauduleuse pouvaient exercer dans plusieurs juridictions sans repasser d’examen.
« Ces documents frauduleux ont été utilisés pour obtenir des licences dans divers États, notamment en Californie, en Pennsylvanie et en Floride. Les employeurs, trompés par ces qualifications falsifiées, ont ensuite embauché ces individus et leur ont versé salaires et avantages », précise le communiqué.
Des pratiques contraires aux exigences de formation
Pour obtenir une licence d’infirmier aux États-Unis, la loi fédérale impose que les candidats terminent un programme accrédité de formation incluant au moins 50 % de stages cliniques.
En Floride, la réglementation est stricte : « Le Board of Nursing impose que tous les candidats aient complété un programme approuvé et aient fourni des relevés officiels avant de pouvoir se présenter à l’examen NCLEX », rappelle le DOJ. Or, les inculpés auraient court-circuité ces obligations en fournissant des diplômes attestant de stages et de cours jamais suivis.
Parmi les douze inculpés annoncés lundi :
Carleen Noreus (Broward County) : inculpée de fraude électronique, blanchiment d’argent et conspiration. Son procès débutera le 1er décembre à Fort Lauderdale.
Patrick Buchanan (Broward County) : propriétaire de Sigma Institute of Health Careers, il a plaidé coupable et sera condamné le 19 novembre.
Gilbert Hyppolite (Palm Beach County) : propriétaire de Techni-Pro Institute, inculpé de fraude électronique.
Irene Matthews (Palm Beach County) : gérante d’Agape Academy of Sciences, inculpée de fraude.
Lemuel Pierre (Broward County) : fondateur de Med-Life Institute, inculpé.
Victor Escalante Zerpa (Miami-Dade County) : fondateur d’Academus University Corp., inculpé.
Cleophat Tanis (Collier County) : co-propriétaire de Med-Life Institute Naples, inculpé.
Lonnette Blair (New Jersey) : ancienne directrice académique de Carleen Home Health School II, inculpée.
Stephanie Dorisca (Broward County) : responsable des soins infirmiers de Techni-Pro Institute, inculpée.
Les procureurs insistent sur la gravité de cette affaire.
Jason A. Reding Quiñones, procureur des États-Unis pour le Southern District of Florida, a déclaré :
« Ces inculpations montrent notre détermination à protéger l’intégrité du système de santé et à empêcher que des personnes non qualifiées ne mettent en danger des patients. »
De son côté, Brett D. Skiles, agent spécial du FBI à Miami, a ajouté : « Nous continuerons à enquêter sur toute tentative de contourner les règles de formation et de certification en soins infirmiers. La sécurité des patients en dépend. »
Enfin, Isaac Bledsoe, agent par intérim de l’Office of Inspector General (HHS-OIG), a précisé : « L’opération Nightingale envoie un message clair : falsifier des diplômes et trahir la confiance des patients ne restera pas impuni. »
Conséquences judiciaires et appel à témoins
Chaque chef de complot en vue de commettre une fraude électronique est passible d’une peine maximale de 20 ans de prison, informe le DOJ, rappelant qu’ »un acte d’accusation n’est qu’une accusation, et que tous les défendeurs sont présumés innocents tant que leur culpabilité n’a pas été prouvée au-delà de tout doute raisonnable ».
Les autorités fédérales invitent toute personne ayant des informations à contacter le FBI.
Avec plus de 7 300 diplômes frauduleux et des ramifications dans plusieurs États, l’opération Nightingale illustre l’ampleur de la fraude dans le secteur de l’éducation en santé.
« Cette affaire rappelle l’importance de maintenir des normes strictes de formation et de certification dans un domaine aussi sensible que les soins infirmiers », conclut le communiqué du DOJ.
Les enquêtes se poursuivent, menées conjointement par le FBI Miami, le HHS-OIG, avec le soutien de Homeland Security Investigations.
Les procureurs Christopher J. Clark et Nicole Grosnoff supervisent respectivement la procédure pénale et les saisies d’actifs.
https://ctninfo.com/?p=36957&preview=true
Crédit : U.S. Department of Justice, Southern District of Florida, communiqué du 15 septembre 2025