Face à la montée fulgurante des violences sexuelles en Haïti, la Représentante spéciale des Nations Unies chargée des violences sexuelles en période de conflit, Pramila Patten, tire la sonnette d’alarme. Dans un communiqué officiel, elle exprime sa « profonde préoccupation » face à l’ampleur des exactions commises par les gangs armés dans un contexte de violence généralisée.
Depuis le début de l’année, les cas de viol, de viol collectif et d’esclavage sexuel ont explosé, en particulier dans les zones abandonnées par l’État. Mme Patten dénonce des violences « utilisées de manière délibérée et systématique pour punir et contrôler les communautés « . Les femmes et les filles sont visées, souvent dans leurs propres foyers ou dans des espaces publics, exposées à une brutalité extrême sans recours ni protection.
Selon les informations recueillies par les Nations Unies, les huit derniers mois ont été marqués par une augmentation significative des cas documentés d’esclavage sexuel. Ces actes barbares s’ajoutent aux enlèvements, assassinats et autres formes de violences perpétrées lors d’attaques menées par des gangs armés, aggravant un climat d’insécurité généralisée à travers le pays.
Dans ce contexte, la Représentante spéciale appelle à une réponse forte et coordonnée. Elle insiste sur l’urgence d’un déploiement complet de la Mission multinationale d’appui à la sécurité (MMAS) afin d’appuyer les forces de sécurité haïtiennes, de renforcer la protection des civils et de bloquer les flux d’armes illicites qui alimentent la violence des gangs.
La crise humanitaire renforce la vulnérabilité des populations. Des milliers de personnes déplacées vivent dans des abris de fortune surpeuplés et dangereux. L’accès aux soins médicaux et au soutien psychosocial pour les victimes reste extrêmement limité, d’autant que de nombreux centres de santé ont dû fermer en raison de l’insécurité.
Dans ce climat chaotique, quelques signes d’espoir émergent. Mme Patten salue la création récente de deux unités judiciaires spécialisées – dont l’une dédiée aux crimes de masse, y compris les violences sexuelles – ainsi que la réouverture du Tribunal de première instance de Port-au-Prince. Ces avancées sont perçues comme des étapes cruciales vers la justice et la restauration de l’État de droit.
Cependant, la Représentante spéciale avertit que ces progrès resteront symboliques sans un financement adéquat ni une volonté politique forte. Elle exhorte le gouvernement haïtien à accélérer la mise en œuvre de ces dispositifs et appelle la communauté internationale à soutenir les efforts nationaux, notamment en fournissant les ressources nécessaires aux prestataires de services pour les survivantes.
« Mettre fin à l’impunité est une condition essentielle pour briser le cycle de la violence « , affirme Mme Patten. Elle conclut en rappelant qu’en l’absence d’une action urgente, c’est toute une génération de femmes et de filles haïtiennes qui restera livrée à l’horreur et au silence.