L’ambassadrice Myrtha Désulmé a dressé un tableau alarmant de la situation en Haïti.
La Représentante permanente du pays auprès de l’organisation a appelé à une mobilisation immédiate, lucide et soutenue pour stopper l’effondrement imminent de la nation.
« Sans sécurité, il n’y aura pas de transition réussie, pas d’élections, pas d’avenir », a martelé la diplomate, insistant sur l’aggravation de la crise qui secoue Haïti depuis l’assassinat du président Jovenel Moïse en 2021.
Une situation humanitaire et sécuritaire dramatique
Mme Désulmé a souligné que les gangs contrôlent aujourd’hui 90 % de Port-au-Prince, forçant les autorités à fuir les bâtiments officiels du centre-ville. Leur influence s’étend désormais aux régions de l’Artibonite et du Centre. Malgré les efforts des forces de sécurité haïtiennes, soutenues par la Mission multinationale d’appui à la sécurité (MMAS), les moyens restent dramatiquement insuffisants pour endiguer cette progression violente.
L’ambassadrice a détaillé un sombre bilan avec plus de 5 600 homicides recensés en 2024, 1,3 million de déplacés internes vivant dans des conditions déplorables, 5,7 millions de personnes en insécurité alimentaire, des hôpitaux, écoles, universités et musées vandalisés ou détruits, un exode migratoire incontrôlable et un trafic généralisé d’armes, de drogues, et même d’organes humains.
« Ce cauchemar ne peut plus durer », a-t-elle lancé, appelant les partenaires d’Haïti à reconnaître l’urgence et la complexité de la crise.
Faisant référence à la résolution AG/Res 3039 adoptée en juin par l’OEA, Mme Désulmé a salué l’engagement du nouveau secrétaire général Albert Ramdin, qui a initié l’élaboration d’un plan d’action à soumettre au gouvernement haïtien. Elle a cependant averti que toute stratégie devait impérativement passer par le rétablissement de la sécurité.
« Aucune élection, aucun développement économique, aucune distribution d’aide humanitaire ne sera possible si les gangs continuent de semer la terreur », a-t-elle souligné.
La diplomate a aussi dénoncé les effets du vieil embargo onusien et du Leahy Law, qui freinent l’équipement des forces de l’ordre haïtiennes, pourtant confrontées à des bandes lourdement armées. Elle a plaidé pour un soutien plus robuste à la MMAS et un investissement dans des formations spécialisées pour les agents de police, militaires et douaniers.
Mme Désulmé a aussi insisté sur la nécessité de repenser l’approche de la communauté internationale : sortir de l’aide humanitaire d’urgence répétitive et investir dans le développement durable, la production locale, et l’autonomisation économique des Haïtiens.
« Haïti est dans la misère malgré des décennies d’aide. Il faut oser changer de paradigme. »
En conclusion, l’ambassadrice a lancé un appel vibrant à la mémoire historique, rappelant le soutien d’Haïti aux luttes de libération de l’Amérique latine, notamment celles de Simon Bolivar et de Francisco de Miranda. Elle a exhorté les nations présentes à faire preuve de la même solidarité historique, aujourd’hui plus que jamais nécessaire.
« Le temps presse. Le peuple haïtien n’a plus la force d’attendre. Si nous ne faisons rien maintenant, demain sera trop tard. »