Depuis plusieurs mois, la communauté internationale, dont les Etats-Unis, le Canada, l’ONU et l’UE, multiplie les sanctions contre les chefs de gangs haïtiens qui terrorisent la population et déstabilisent le pays. Ces sanctions vont des interdictions de voyager aux gels des avoirs à l’étranger.
Les dernières en date ont été adoptées par l’Union européenne, qui a annoncé le 15 juillet 2025 avoir inscrit sur sa liste de sanctions trois puissants chefs de gangs haïtiens, responsables d’actes menaçant la paix, la stabilité et la sécurité du pays. Il s’agit de Micanor Altès, chef du gang Wharf Jérémie, responsable du massacre de 207 personnes en décembre 2024 ; Christ-Roi Chéry, chef du gang Ti Bwa, et Jeff Larose, chef du gang Canaan, tous deux accuses d’être responsables de recrutement forcé d’enfants, d’enlèvements, d’homicides et de violences sexuelles et sexistes.
En vertu des sanctions, ces trois caïds seront soumis à un gel de leurs avoirs, une interdiction de voyager vers l’UE et il leur sera interdit de leur fournir, directement ou indirectement, des fonds ou des ressources économiques.
En octobre 2022, le Conseil de sécurité de l’ONU a adopté un régime de sanctions contre les gangs haïtiens, incluant des gels d’avoirs, des interdictions de voyager et des embargos sur les armes. Des pays comme les États-Unis, le Canada, la République dominicaine ainsi que l’Union Européenne ont suivi, ciblant des figures notoires du crime organisé en Haïti. L’objectif de ces sanctions est d’asphyxier financièrement les groupes criminels et limiter leur influence.
Pourtant, les exactions des gangs n’ont pas diminué. Au contraire, les bandes armées criminelles se sont renforcées, étendant leur contrôle sur de nouveaux territoires, comme Port-au-Prince, où plus de 80% de la capitale sont sous leur emprise. Si les sanctions internationales visent à isoler les chefs de gangs, leur impact réel reste discutable.
Les réseaux criminels disposent de circuits financiers informels, rendant le gel des avoirs partiellement inefficace. Les gangs tirent l’essentiel de leurs revenus dans des extorsions où ils exigent des paiements réguliers des entreprises, des commerçants et même des vendeurs ambulants en échange de « protection » ou de la permission d’opérer dans leurs zones d’influence ; le contrôle des activités économiques informelles telles que le transport public en instaurant des péages notamment sur les routes nationales ; le pillage de magasins, d’entrepôts et de cargaisons. Le trafic de drogue, d’armes et d’organes, selon des autorités, constitue également une source de revenus importante pour certains gangs.
Malgré les mesures ciblées, l’insécurité persiste en Haïti, soulevant des questions sur l’efficacité réelle des sanctions.
Des experts estiment que les sanctions sont nécessaires, mais insuffisantes seules. Selon eux, sans une action concertée sur le terrain pour démanteler les gangs, les sanctions resteront des mesures cosmétiques.
D’autres observateurs plaident en faveur d’une stratégie globale incluant un renforcement des forces de police haïtiennes, la lutte contre la corruption facilitant l’impunité des gangs et un réel processus politique pour sortir de la crise. Sans quoi, Haïti risque de rester engluée dans un cycle de violence sans fin.