Floride : un citoyen américain arrêté à tort comme “étranger sans autorisation”

Emmanuel Paul

Juan Carlos Lopez-Gomez, un citiyen américain de 20 ans né dans l’Etat de la  Géorgie, a été arrêté mercredi en Floride et détenu pendant près de 24 heures. Il a été accusé à tort d’être un “étranger sans autorisation”. Bien que ses documents d’identité prouvent sa citoyenneté américaine, les autorités locales ont maintenu sa détention à la demande de l’agence fédérale de l’immigration (ICE), selon un reportage de HuffPost.

L’affaire a provoqué un tollé dans la communauté locale et soulevé des inquiétudes quant à l’application d’une nouvelle loi migratoire en Floride, dont un juge fédéral avait ordonné la suspension.

Jeudi matin, devant un tribunal du comté de Leon, la juge LaShawn Riggans a examiné l’acte de naissance de Lopez-Gomez présenté par sa mère, confirmant l’authenticité du document. “C’est un document authentique”, a-t-elle déclaré, selon le Florida Phoenix cité par HuffPost. Elle a également indiqué qu’aucun élément ne justifiait l’accusation portée contre lui. Toutefois, en dépit de cette reconnaissance légale, Lopez-Gomez ne pouvait être libéré immédiatement. Le parquet a affirmé que la demande de détention de l’ICE avait la priorité sur la décision du tribunal. “Ce tribunal n’a pas de compétence autre que ce que j’ai déjà exercé”, a reconnu la juge Riggans.

Sa mère, Sebastiana Gomez-Perez, a exprimé sa frustration face à une situation kafkaïenne : “Je voulais leur dire : ‘Où allez-vous l’emmener ? Il est d’ici’”, a-t-elle confié au Phoenix. “Je me sentais immensément impuissante, car je ne pouvais rien faire, et je suis désespérée de sortir mon fils de là.”

Lopez-Gomez a été libéré après l’intervention de son avocat, qui a également annoncé une action en justice contre la violation des droits fondamentaux de son client.

Un cas symptomatique des dérives de la loi migratoire floridienne

Lopez-Gomez aurait été appréhendé alors qu’il était passager dans une voiture arrêtée pour excès de vitesse. Le policier qui l’a interpellé a rédigé dans son rapport que le jeune homme avait affirmé être “dans le pays illégalement”. Pourtant, selon sa famille, il est bel et bien né en Géorgie, a vécu plusieurs années au Mexique, puis est revenu vivre aux États-Unis il y a quatre ans.

L’accusation s’appuie sur une loi récemment votée en Floride qui criminalise l’entrée dans l’État pour les personnes considérées comme étant en situation irrégulière. La loi fait actuellement l’objet d’un recours de la Florida Immigrant Coalition, qui conteste sa légalité au regard du droit fédéral. Un juge avait temporairement suspendu cette loi le 4 avril dernier.

Thomas Kennedy, analyste politique au sein de cette coalition, a commenté l’affaire sur les réseaux sociaux : “Voilà ce à quoi mènent les lois étatiques persécutoires et mal rédigées en Floride.”

L’ICE a émis une demande de détention de 48 heures contre Lopez-Gomez, mais n’a pas répondu aux questions du HuffPost concernant les raisons pour lesquelles un citoyen américain a été placé sous leur autorité.

Cet incident intervient dans un contexte où les tensions autour de la politique migratoire s’intensifient au niveau national. Plus tôt cette semaine, le président Donald Trump a déclaré à des journalistes qu’il était « tout à fait favorable » à l’envoi de citoyens américains dans la prison de haute sécurité au Salvador, le CECOT (Centro de Confinamiento del Terrorismo). Le mois dernier, plusieurs centaines de migrants ont été transférés vers cette prison, en violation d’une décision de justice.

L’administration Trump a également ignoré une ordonnance fédérale dans le cas de Kilmar Abrego Garcia, un migrant salvadorien expulsé à tort malgré une protection légale contre l’expulsion — erreur que l’administration a qualifiée « d’administrative ».

Un signal d’alarme

La détention injustifiée de Lopez-Gomez, malgré des preuves irréfutables de sa citoyenneté, met en lumière les risques liés à l’application précipitée de lois migratoires controversées. Elle soulève aussi une question de fond : dans un État de droit, comment un citoyen peut-il être traité comme un étranger — même quand la loi dit le contraire ?

Cet article est basé sur les informations recueillies par Jessica Schulberg pour le HuffPost, publiées le 17 avril 2025.

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