Le tribunal fédéral du Massachusetts s’apprête à examiner l’un des dossiers migratoires les plus sensibles de l’année 2025.
L’affaire Haitian Americans United Inc. v. Trump, enregistrée sous le numéro 1:25-CV-10498, sera entendue prochainement devant la Cour fédérale du district du Massachusetts, dans un contexte de forte inquiétude au sein des communautés haïtienne et vénézuélienne installées aux États-Unis.
Le recours judiciaire a été déposé le 3 mars 2025 et vise directement le président Donald J. Trump, ainsi que le Département de la Sécurité intérieure (DHS) et sa secrétaire, Kristi Noem. Il est porté par une coalition d’organisations communautaires et de défense des droits des immigrés, notamment Haitian Americans United Inc., la Venezuelan Association of Massachusetts, l’UndocuBlack Network, Inc., ainsi que plusieurs plaignants individuels. La plainte a été amendée après que l’administration Trump a mis fin au statut de protection temporaire pour les Haïtiens en Novembre dernier.
Au cœur du litige se trouve la décision de l’administration Trump de mettre fin au Statut de protection temporaire (TPS) pour des milliers de ressortissants haïtiens et vénézuéliens vivant légalement aux États-Unis depuis parfois plus d’une décennie.
Les plaignants affirment que cette mesure ne repose pas sur une analyse objective de la situation humanitaire de leurs pays d’origine, mais sur des considérations discriminatoires.
Selon la plainte, la fin du TPS aurait été motivée par des préjugés raciaux et xénophobes, alimentés notamment par les déclarations publiques du président Trump au sujet des immigrants venus d’Haïti et du Venezuela. Le recours soutient que ces prises de position ont influencé les décisions politiques, en violation du principe d’égalité protégé par le Cinquième Amendement de la Constitution américaine.
Violations présumées de l’Administrative Procedure Act
Les organisations plaignantes invoquent également des violations de l’Administrative Procedure Act (APA), une loi fédérale qui impose que les décisions gouvernementales soient fondées sur des éléments factuels, cohérents et exempts de partialité. Elles accusent l’administration d’avoir ignoré des données essentielles sur l’insécurité, les crises humanitaires et les conditions socioéconomiques qui perdurent en Haïti et au Venezuela.
L’APA exige en effet que les agences fédérales justifient leurs décisions par un raisonnement rationnel. Or, selon les plaignants, la résiliation du TPS serait entachée d’arbitraire, de favoritisme politique et d’absence de fondement légal.
Dans leur requête, les organisations haïtiennes, vénézuéliennes et afro-descendantes demandent au tribunal d’émettre une injonction empêchant le gouvernement fédéral de mettre à exécution la fin du TPS. Elles soulignent qu’une telle mesure exposerait des dizaines de milliers de familles à l’expulsion, à la perte de leur emploi et à une précarité immédiate.
Les avocats des plaignants affirment que sans intervention judiciaire, les immigrants protégés par le TPS risquent d’être contraints de retourner dans des pays toujours plongés dans des crises économiques, sécuritaires ou politiques graves.
Une procédure toujours en cours
Depuis son dépôt en mars 2025, l’affaire a déjà donné lieu à plusieurs étapes procédurales, notamment la phase de discovery et le traitement de motions présentées par les deux parties. Les échanges portent notamment sur la pertinence des communications internes du gouvernement, susceptibles d’éclairer les motivations ayant conduit à la fin du programme.
La prochaine audience devrait être déterminante pour la suite du dossier : le juge pourrait décider de maintenir ou de suspendre temporairement la décision de l’administration Trump, en attendant un procès complet sur le fond.
Pour les organisations à l’origine du recours, la bataille judiciaire dépasse largement le cadre administratif : il s’agit d’un combat pour la justice, contre ce qu’elles qualifient de politiques “arbitraires, discriminatoires et illégales”. Elles espèrent que la justice fédérale rappellera que les décisions migratoires doivent respecter les principes constitutionnels et ne peuvent être guidées par des préjugés.
À quelques jours de l’audience, la communauté haïtienne du Massachusetts, l’une des plus importantes du pays, se prépare à une mobilisation continue. Les défenseurs des droits des immigrés, eux, soulignent que l’issue du dossier pourrait avoir un impact national et définir le cadre légal des protections offertes par le TPS pour les années à venir.



