Face à la ligne dure de Trump, des élus républicains et démocrates proposent une régularisation des immigrants sans papiers

Emmanuel Paul
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Emmanuel Paul est un journaliste chevronné et un conteur accompli, animé par un engagement profond envers la vérité, la communauté et l’impact social. Il est le...

Les lignes commencent à bouger un peu au niveau du parti républicain concernant la politique extrême de déportation des immigrants en situation irrégulière aux États-Unis.

Dans un rare geste bipartisan, un groupe de parlementaires américains, dont plusieurs élus républicains, a relancé cette semaine une proposition de loi qui offrirait un chemin vers la citoyenneté à certains migrants en situation irrégulière. Intitulée « Dignity Act », cette initiative marque un tournant politique à contre-courant de la ligne dure de l’administration Trump sur l’immigration.

Le projet de loi, réintroduit le mardi 15 juillet 2025 par la représentante républicaine Maria Elvira Salazar (Floride) et la démocrate Veronica Escobar (Texas), propose une refonte partielle du système migratoire américain. Selon Newsweek, le texte vise à concilier sécurité frontalière et régularisation, en s’attaquant à plusieurs volets : statut légal pour les sans-papiers présents depuis longtemps, réforme de l’asile, modernisation des ports d’entrée et responsabilisation accrue de l’agence ICE (Immigration and Customs Enforcement).

Parmi les mesures phares du texte figurent :

  • la mise en place d’un programme encadré permettant à certains immigrants de travailler légalement avant d’accéder à la carte verte,

  • une réforme du système d’asile avec assistance juridique,

  • la création de centres de traitement régionaux pour éviter les traversées dangereuses vers la frontière sud,

  • un renforcement des moyens technologiques et humains à la frontière.

La proposition inclut également une disposition très attendue : une voie d’accès à la citoyenneté pour les jeunes sans-papiers arrivés mineurs aux États-Unis, souvent appelés « Dreamers ».

Des républicains en rupture avec Trump

Fait notable : une dizaine de républicains ont apporté leur soutien au texte. Il s’agit de :

  • Maria Elvira Salazar (Floride)

  • Mario Rafael Diaz-Balart (Floride)

  • Brian Fitzpatrick (Pennsylvanie)

  • Mike Lawler (New York)

  • Dan Newhouse (Washington)

  • David Valadao (Californie)

  • Mike Kelly (Pennsylvanie)

  • Gabe Evans (Colorado)

  • Marlin Stutzman (Indiana)

  • Don Bacon (Nebraska)

  • Young Kim (Californie)

Ce soutien survient quelques jours seulement après l’adoption par le président Trump de la loi controversée One Big Beautiful Bill Act, axée sur la répression et la détention.

Interrogée par Newsweek, Maria Salazar a reconnu la contribution énorme des immigrants dans l’économie américaine. « Ils ont enfreint la loi, certes, mais ils sont ici depuis des années, ils travaillent, ils participent à notre économie. Nous avons besoin de leurs mains pour continuer à être la première puissance mondiale. » Elle qualifie le texte de « réforme migratoire la plus marquante depuis une génération ».

Mais ce positionnement divise. Dans les rangs conservateurs, certains dénoncent une forme d’amnistie déguisée.

Pourtant, un changement d’attitude semble se profiler au sein de la population américaine.

Un sondage Gallup publié le 11 juillet indique que seuls 48 % des électeurs républicains souhaitent désormais une réduction des niveaux d’immigration, contre 88 % en 2024, a fait savoir Newsweek.

Malgré cet élan bipartisan, les chances d’adoption restent faibles. L’avocate spécialisée Rosanna Berardi, citée par Newsweek, souligne les contradictions avec la législation récemment adoptée.

Le One Big Beautiful Bill Act, signé par Donald Trump, renforce massivement les outils de détention, supprime les audiences de libération sous caution et rend toute régularisation extrêmement difficile.

« Le Dignity Act entre en collision frontale avec les priorités du H.R.1. Tant que le Congrès ne revoit pas ces dispositifs répressifs, il n’y aura pas d’espace réel pour ce type de compromis », analyse Berardi. Elle estime toutefois que cette initiative pourrait rouvrir un débat sérieux sur des mesures ciblées, notamment en faveur des travailleurs agricoles et des secteurs en pénurie de main-d’œuvre.

Les élus démocrates engagés dans le projet insistent sur l’urgence. Veronica Escobar, co-auteure, explique dans un communiqué repris par Newsweek : « J’ai vu les dégâts d’un système défaillant. Ce texte est une première étape réaliste vers une réforme que nous devons aux familles, aux entreprises et à nos institutions. »

Même son de cloche chez l’élu californien Adam Gray, pour qui « l’économie de la Vallée centrale ne pourrait pas fonctionner sans les travailleurs immigrés ». Il plaide pour une législation qui reflète la réalité du terrain plutôt qu’une idéologie punitive.

Du côté des démocrates ayant signé la proposition de régularisation de certains immigrants en situation irrégulière, on retrouve :

  • Veronica Escobar (Texas)

  • Salud Carbajal (Californie)

  • Lori Trahan (Massachusetts)

  • Adam Gray (Californie)

  • Jake Auchincloss (Massachusetts)

  • Nikki Budzinski (Illinois)

  • Adriano Espaillat (New York)

  • Greg Landsman (Ohio)

  • Susie Lee (Nevada)

  • Mike Levin (Californie)

  • Laura Gillen (New York)

  • Hillary Scholten (Michigan)

Si elle parvenait à être adoptée, cette proposition permettrait de régulariser la situation de plusieurs millions d’immigrants sans papiers aux Etats-Unis.

Il est important de noter que la grande majorité des républicains co-signataires de la proposition sont issus de districts remportés par la candidate démocrate lors des dernières élections présidentielles de 2024. Ces districts comptent également une forte population d’immigrants, qui peuvent faire une énorme différence lors des élections de mi-mandat en novembre 2026.

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