L’ancien Navy Seal et fondateur de la société militaire privée Blackwater, Erik Prince, a annoncé un accord de dix ans avec le gouvernement haïtien pour lutter contre les gangs armés et participer à la collecte des impôts. Cette initiative, menée par sa nouvelle entreprise Vectus Global, suscite autant d’espoirs que de vives inquiétudes dans le pays caribéen en proie à une crise sécuritaire et humanitaire sans précédent.
Selon Prince, interrogé par Reuters, Vectus Global a commencé ses opérations en mars 2024, avec des drones et des équipes de sécurité. Mais le projet prend désormais une autre dimension : plusieurs centaines de mercenaires américains, européens et salvadoriens – incluant des tireurs d’élite et des spécialistes du renseignement – seront déployés dans les prochaines semaines, appuyés par des hélicoptères et des bateaux.
L’objectif affiché ? Reprendre le contrôle des routes principales et des zones gangrenées par les groupes armés. « Un succès, pour moi, sera de pouvoir traverser Haïti sans être stoppé par les gangs », a déclaré Prince à l’agence Reuters.
La signature du contrat entre le gouvernement haïtien et Erik Prince avait été révélée en mai dernier par le New York Times, indiquant que « les États-Unis bien qu’ils soient informés des activités d’Erik Prince, le contrat reste opaque ».
Un rôle inédit : la collecte des impôts
Au-delà de la sécurisation, Vectus Global s’impliquera dans la perception des taxes aux frontières, notamment avec la République dominicaine – une source cruciale de revenus pour l’État haïtien, aujourd’hui asphyxié par l’insécurité.
Cependant, les détails financiers restent flous : Prince refuse de révéler le montant que touchera son entreprise, ni quelle part des recettes fiscales elle pourrait prélever.
Proche de l’ancien président américain, Erik Prince a multiplié les contrats sécuritaires depuis le retour de Trump au pouvoir, notamment en Équateur et en République démocratique du Congo.
« Il est difficile d’imaginer qu’il opère sans l’aval de l’administration Trump », estime Romain Le Cour Grandmaison, expert de l’Initiative mondiale contre la criminalité transnationale organisée. Pourtant, la Maison Blanche et le Département d’État nient toute implication.
Des doutes persistants
L’efficacité d’une telle opération reste incertaine. Des entreprises de sécurité ont déjà échoué en Haïti, comme Studebaker Defense, dont deux membres avaient été kidnappés avec la complicité présumée de policiers haïtiens corrompus, selon le New York Times.
« Les sociétés militaires privées ne sont pas une solution durable », alerte Me Gédéon Jean, directeur du Centre d’analyse et de recherche sur les droits humains en Haïti. « Leurs interventions s’accompagnent souvent de violations des droits et détournent des fonds qui devraient renforcer les forces locales. »
Une population au bord du gouffre
Entre famine, violences et effondrement de l’État, les Haïtiens attendent désespérément une solution. Le nouveau président du Conseil présidentiel de transition (CPT), Laurent Saint-Cyr, a appelé à « un soutien international accru », sans mentionner explicitement Vectus.
Reste à savoir si cette intervention, menée par une figure aussi controversée qu’Erik Prince, apportera enfin la stabilité – ou aggravera les tensions dans un pays déjà exsangue.
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