Malgré une frontière fermée et une crise haïtienne qui s’éternise, les échanges commerciaux entre les deux pays voisins de l’île d’Hispaniola résistent. Et même plus : les exportations dominicaines vers Haïti connaissent une croissance spectaculaire.
Les chiffres viennent de tomber, et ils sont éloquents. Malgré les barrières politiques et sécuritaires, les exportations dominicaines vers Haïti ont bondi de 32,3 % sur les huit premiers mois de l’année, pour atteindre 775,8 millions de dollars.
Cette croissance record cache toutefois deux réalités très différentes.
D’un côté, les exportations sous le régime national – c’est-à-dire les produits fabriqués localement en République Dominicaine – ont explosé de plus de 52 %. Elles représentent désormais plus des deux tiers des ventes à Haïti.
Les produits phares ? Du ciment, des barres en acier, de l’huile de soja. Autant de biens essentiels à la construction et à l’alimentation de base, qui semblent trouver preneur malgré la crise.
De l’autre côté, le secteur des zones franches – traditionnellement tourné vers le textile – est en recul. Les exportations de t-shirts, de maillots et autres tissus ont chuté de près de 12 %. Une baisse qui reflète probablement les difficultés du secteur manufacturier haïtien à fonctionner normalement en période d’instabilité.
Mais cette relation commerciale est surtout marquée par un profond déséquilibre. Tandis que les exportations dominicaines se portent bien, les importations en provenance d’Haïti, elles, s’effondrent.
Les produits haïtiens vendus à la République Dominicaine – principalement des t-shirts, des ficelles textiles et de l’alcool éthylique – ont chuté de près de 58 % cette année. Un chiffre qui en dit long sur l’asphyxie économique que traverse le pays.
Cette situation illustre la dépendance structurelle d’Haïti vis-à-vis de son voisin. Haïti importe des produits de première nécessité et des matériaux de construction, mais ses propres capacités d’exportation s’étiolent, faute de stabilité et d’accès aux intrants. Le déficit commercial haïtien ne fait que se creuser.
La balance des échanges commerciaux d’Haïti avec la République dominicaine accuse depuis plusieurs années un déficit important et persistant.
Des voix n’ont jamais de cesser de s’élever en Haïti pour dénoncer le déséquilibre des échanges commerciaux avec la République Dominicaine, un déséquilibre qui a toujours été favorable à cette dernière et s’est accentué avec la dégradation de l’économie haïtienne face à l’instabilité politique et la violence.
Le problème n’est pas seulement le déséquilibre en soi, mais aussi le fait que la République Dominicaine soit un point de transit majeur pour les importations haïtiennes, ce qui génère des frustrations et a conduit Haïti à restreindre le passage des camions transportant des produits non-dominicains via ses ports.
En résumé, la frontière est fermée pour les personnes, mais les biens, surtout ceux en provenance de République Dominicaine, continuent de circuler. Cette dynamique souligne la résilience des liens économiques, mais aussi la vulnérabilité croissante d’Haïti, dont l’économie peine à exporter, même vers son partenaire le plus proche.
Un tableau contrasté, donc, qui montre une Haïti toujours plus dépendante des produits dominicains, malgré la fermeture officielle de la frontière.