Alors que la crise en Haïti atteint des niveaux sans précédent, la République dominicaine intensifie ses expulsions vers son voisin, y compris celles de femmes enceintes ou allaitantes. Une pratique dénoncée par l’Organisation des Nations unies, qui alerte sur une violation manifeste des normes internationales relatives à la protection des personnes vulnérables.
Depuis fin avril, des centaines de femmes haïtiennes en situation de grossesse ou ayant récemment accouché ont été expulsées de manière expéditive vers Haïti, pays en proie à une instabilité extrême.
Selon les données relayées par l’ONU, près de 20 000 personnes ont été refoulées à la frontière au mois d’avril 2025, un record mensuel. Parmi elles, un nombre croissant de femmes en état de grande fragilité.
Dans une déclaration publiée mardi, le bureau humanitaire des Nations unies en Haïti a exprimé une “profonde préoccupation” face à cette politique migratoire, soulignant qu’elle contrevient aux principes fondamentaux du droit international, a rapporté France 24.
Ulrika Richardson, coordinatrice humanitaire des Nations unies en Haïti, a rappelé que la protection des populations vulnérables doit demeurer une priorité absolue.
Le soutien logistique sur le terrain s’organise tant bien que mal. L’Organisation internationale pour les migrations (OIM), en coopération avec les autorités haïtiennes et d’autres partenaires, affirme avoir assisté chaque jour environ 15 femmes enceintes et 15 mères allaitantes depuis le 22 avril aux postes-frontières.
La République dominicaine et Haïti, qui partagent l’île d’Hispaniola, entretiennent depuis longtemps des relations bilatérales tendues. Mais les tensions se sont accentuées à mesure que la crise haïtienne s’enracinait.
La réélection du président dominicain Luis Abinader en mai 2024 a confirmé un virage sécuritaire : pendant sa campagne, il avait promis de renforcer les contrôles migratoires et les expulsions.
La mise en œuvre de ces promesses frappe désormais une population extrêmement précaire. Les femmes expulsées se retrouvent livrées à elles-mêmes dans un pays où l’insécurité gangrenée par les groupes armés, l’effondrement des services de santé et le déplacement de masse de la population rendent toute assistance quasi impossible.
La situation en Haïti, déjà alarmante, continue de se détériorer. Dans un rapport récent, la représentante spéciale des Nations unies, Maria Isabel Salvador, a averti que le pays approche d’un “point de non-retour”, appelant à une réponse internationale plus robuste.
Les chiffres parlent d’eux-mêmes : plus d’un million de personnes déplacées à l’intérieur du territoire selon les estimations de l’ONU. La majorité d’entre elles fuient les violences de groupes criminels, notamment à Port-au-Prince, où l’État peine à exercer un contrôle minimal.
Alors que les autorités dominicaines invoquent la souveraineté nationale et la nécessité de réguler les flux migratoires, de nombreuses voix rappellent que la sécurité des personnes – en particulier des femmes enceintes et des nourrissons – ne saurait être reléguée au second plan.
Des organisations humanitaires dénoncent une politique de refoulement indifférente à la détresse humaine et incompatible avec les obligations internationales en matière de droits de l’homme. Elles appellent à un dialogue régional pour établir des mécanismes de protection coordonnés.