Des immigrants en provenance de Haïti, du Venezuela et d’autres pays ont été retirés d’une cérémonie de naturalisation à la dernière minute alors qu’ils s’apprêtaient à prêter serment pour devenir citoyens américains.
L’incident s’est produit jeudi au Faneuil Hall, un lieu historique de Boston, en présence de plusieurs centaines de candidats.
La sénatrice Elizabeth Warren du Massachusetts a dénoncé cette pratique en déclarant que des responsables fédéraux auraient demandé aux participants : « De quel pays venez-vous ? », avant d’écarter certains candidats en fonction de leur pays de naissance.
« Au lieu d’être autorisés à prêter serment et à devenir citoyens, certains ont été rejetés uniquement à cause de l’endroit où ils sont nés. C’est scandaleux, contraire aux valeurs américaines, et cela doit cesser », a affirmé Warren selon Fallriver reporte.
Un témoignage poignant
Une femme haïtienne qui avait reçu une notification tardive annonçant le report de la cérémonie s’était présentée malgré tout, après des mois de préparation.
Selon son témoignage rapporté par WGBH cité par Fallriver Reporter, elle a été arrêtée et écartée après avoir répondu à des questions sur son pays d’origine, décrivant avoir été « arrachée de la ligne » sans explication claire au moment où elle s’apprêtait à prêter serment.
D’autres candidats originaires d’Érythrée, du Venezuela et d’Éthiopie ont connu une expérience similaire. Certains ont éclaté en sanglots ; d’autres ont tenté en vain d’obtenir des clarifications.
Gail Breslow, directrice de Project Citizenship, a témoigné auprès de WGBH de « scènes de détresse profonde », avec des candidats « incapables de comprendre pourquoi leur naturalisation était soudainement interrompue ».
Les représentants d’organisations présentes sur place qualifient la procédure d' »arbitraire et brutale ». Ils soulèvent des préoccupations juridiques majeures concernant la conformité avec le principe d’égalité de traitement, la légalité d’un retrait après approbation, et le respect du droit administratif.
Une nouvelle politique de vérification
L’administration Trump a établi une liste de 19 pays classés comme étant à « risque élevé ».
Cette liste comprend notamment Haïti, le Venezuela, plusieurs pays d’Afrique, ainsi que certains États du Moyen-Orient et d’Asie.
Les ressortissants de ces pays doivent désormais subir des vérifications supplémentaires, y compris à l’étape finale de la naturalisation.
Selon des représentants d’organisations de défense des droits des immigrants, cette application au moment même de la cérémonie représente une rupture majeure avec les pratiques traditionnelles de l’USCIS, où la cérémonie est normalement une simple formalité confirmant officiellement la citoyenneté.
Les candidats écartés avaient déjà rempli toutes les obligations légales préalables. L’exclusion soudaine, basée uniquement sur la nationalité d’origine, soulève des questions juridiques importantes.
Des implications juridiques et politiques
Plusieurs experts consultés par WGBH estiment que cette politique pourrait donner lieu à des recours collectifs, à des plaintes pour discrimination fondée sur l’origine nationale, ou à des auditions publiques au Congrès.
L’USCIS n’a pas encore publié les critères détaillés justifiant cette classification « à haut risque », ni fourni de justification publique concernant l’application de cette politique au moment de la cérémonie.
L’incident a suscité une vive émotion au sein des diasporas haïtienne et latino-américaine du Massachusetts, notamment à Boston, Cambridge, Brockton et Randolph. Beaucoup y voient une extension des mesures restrictives adoptées par l’administration Trump dans d’autres domaines migratoires.
La mise à l’écart de candidats lors d’une cérémonie officielle renforce le sentiment d’insécurité administrative parmi les résidents qui respectent scrupuleusement les procédures légales.
La sénatrice Elizabeth Warren a promis de demander des comptes et d’exiger que cette politique soit immédiatement suspendue.
À ce stade, l’USCIS n’a fourni aucune explication détaillée concernant les raisons d’appliquer ces critères à la dernière étape du processus de naturalisation ou les mécanismes de recours disponibles pour les personnes exclues.
L’incident du Faneuil Hall révèle une transformation de la politique migratoire américaine et soulève des questions fondamentales quant aux principes d’égalité de traitement au cœur du processus de citoyenneté.
Pour les personnes concernées, un moment d’accomplissement attendu s’est transformé en une exclusion inattendue basée uniquement sur leur pays de naissance.



