À Springfield, les Haïtiens frappés par les pertes d’emploi sollicitent massivement l’aide sociale

Emmanuel Paul
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Emmanuel Paul
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Emmanuel Paul est un journaliste chevronné et un conteur accompli, animé par un engagement profond envers la vérité, la communauté et l’impact social. Il est le...

La décision d’annuler le statut légal des bénéficiaires du programme de libération conditionnelle (CHNV) commence à avoir de sérieuses conséquences sur la communauté haïtienne de Springfield, dans l’Ohio.

Avec la perte d’emplois et l’arrêt de certains statuts migratoires, de nombreux habitants d’origine haïtienne se retrouvent aujourd’hui dans une situation de grande précarité, nécessitant un soutien immédiat pour couvrir leurs besoins essentiels.

Selon un rapport publié le 19 septembre 2025 par le Springfield News-Sun, plusieurs organisations locales alertent sur une demande d’assistance qui ne cesse de croître.

Nourriture, logement, électricité et soins de base : les besoins sont multiples et urgents, rapporte Springfield News-Sun.

Casey Rollins, directrice de l’association St. Vincent de Paul, a indiqué que la situation devient particulièrement alarmante : « La demande d’aide parmi les immigrants haïtiens est vraiment en train de devenir intense », a-t-elle affirmé lors d’une réunion de la Springfield Haitian Coalition.

De son côté, Vilès Dorsainvil, président du Haitian Community Help and Support Center, a tiré la sonnette d’alarme en évoquant le risque d’une véritable crise humanitaire. « Tant de personnes ne travaillent pas, tant de personnes ont été licenciées ; la situation est très difficile pour elles aujourd’hui », a-t-il expliqué. « Elles ne peuvent pas payer leur loyer, elles ne peuvent pas payer leurs factures d’électricité. Elles ne peuvent pas mettre de nourriture sur la table. »

Dorsainvil a souligné la complexité du problème. « Imaginez qu’aujourd’hui, vous donniez à quelqu’un des denrées alimentaires qui peuvent durer deux ou trois jours. Cela peut aider temporairement, mais cela ne résout pas le problème. Je ne suis pas sûr qu’il y ait une institution capable de s’engager à payer le loyer pour les gens, en particulier les Haïtiens ayant un statut de réfugié. »

Pour lui, empêcher les Haïtiens de travailler revient à « les envoyer sur le chemin de l’échec ».

La crise s’explique en grande partie par les changements dans la politique migratoire américaine, a rappelé Springfield News-Sun.

Beaucoup d’Haïtiens étaient entrés aux États-Unis via le programme humanitaire CHNV (Cuba, Haïti, Nicaragua, Venezuela). Mais en juin dernier, le Département de la Sécurité intérieure (DHS) a commencé à mettre fin à ces statuts, ce qui a provoqué la perte de nombreux emplois.

Si les décisions ont été contestées, une cour fédérale a tranché que ces statuts pouvaient être révoqués en attendant l’issue d’un procès en cours.

Par ailleurs, le statut de protection temporaire (TPS), qui protégeait plusieurs ressortissants haïtiens, devait initialement prendre fin le 3 février 2026, après une extension de l’administration Biden. Mais le DHS avait annoncé une résiliation anticipée dès le 2 septembre 2025, affirmant que les conditions en Haïti s’étaient améliorées.

Un juge fédéral a toutefois jugé cette décision illégale et bloqué la fin anticipée du programme. Cependant, un appel est attendu et, pour l’heure, l’échéance de février 2026 demeure officielle.

Aide alimentaire et logistique en tension

Face à l’urgence, St. Vincent de Paul et des églises partenaires à Springfield distribuent désormais des boîtes d’alimentation d’urgence en plus de leurs services habituels de paniers alimentaires.

Casey Rollins observe déjà une hausse des visites, non seulement parmi les Haïtiens mais aussi chez d’autres habitants en difficulté : « Nous constatons une augmentation et nous nous attendons à en voir davantage », a-t-elle confié au Springfield News-Sun.

Ce centre, affilié à Feeding America et à l’Ohio Association of Foodbanks, dessert une communauté couvrant trois comtés et distribue six millions de livres de nourriture chaque année à travers 65 agences caritatives.

Les estimations du Clark County Combined Health District évaluent la population haïtienne locale entre 10 000 et 12 000 personnes. Un chiffre en baisse par rapport aux 15 000 avancés l’année précédente, mais qui ne reflète pas une migration de masse, précise le rapport.

Dans le système scolaire, l’impact est notable. Pam Shay, directrice des programmes fédéraux du Springfield City School District, a expliqué lors d’une réunion que l’établissement comptait 1 873 élèves non anglophones à la fin de l’année scolaire en mai, contre environ 1 700 en ce début d’année.

Les élèves haïtianophones représentent une part importante : en mai, ils étaient 815, contre environ 745 ou 750 à la rentrée. « Nous avons perdu environ 150 élèves mais vu arriver près de 250 nouveaux », a souligné Pam Shay.

La mobilisation communautaire reste forte. Le 2 août dernier, plus de 200 personnes se sont rassemblées sur la City Hall Plaza de Springfield pour l’événement Love Thy Neighbor, organisé par Springfield G92, une coalition d’églises locales.

Dans une déclaration relayée par le Springfield News-Sun, l’organisation a affirmé : « Nous sommes engagés pour la sécurité et la dignité de nos voisins et amis haïtiens. »

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Source: https://www.springfieldnewssun.com

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