Le président américain devra patienter avant d’espérer décrocher le prix Nobel de la paix pour lequel il a mené campagne avec ardeur.
Cette année, la prestigieuse distinction a été attribuée à María Corina Machado, figure emblématique de l’opposition vénézuélienne, récompensée pour « sa lutte en faveur d’une transition juste et pacifique de la dictature vers la démocratie ».
L’annonce du Comité Nobel norvégien, faite le 10 octobre à Oslo, a pris de court observateurs et dirigeants internationaux.
Alors que le nom de Donald Trump circulait parmi les favoris après la trêve négociée à Gaza, le comité a préféré saluer « le courage civil extraordinaire » d’une femme qui, depuis plus de deux décennies, incarne la résistance démocratique au Venezuela. « Le travail inlassable de María Corina Machado pour la défense des droits démocratiques du peuple vénézuélien constitue l’un des exemples les plus remarquables de courage civil observés en Amérique latine », a indiqué le comité dans son communiqué.
Âgée de 58 ans, ingénieure industrielle de formation et ancienne députée à l’Assemblée nationale, María Corina Machado est la voix la plus constante de l’opposition au régime chaviste. Son engagement contre la dérive autoritaire de Nicolás Maduro, successeur d’Hugo Chávez, lui a valu arrestations, agressions, et interdictions politiques.
En 2024, alors qu’elle devait représenter la coalition d’opposition à la présidentielle, le Conseil national électoral — sous contrôle gouvernemental — l’a déclarée inéligible. Refusant de se taire, elle a soutenu Edmundo González Urrutia, candidat alternatif, dont la victoire fut revendiquée par l’opposition. Le pouvoir a pourtant proclamé Maduro vainqueur avec 51 % des voix, provoquant des manifestations massives réprimées avec brutalité.
Menacée de mort, Machado a dû entrer dans la clandestinité sans jamais quitter le territoire. À l’époque, elle confiait à la radio américaine NPR: « Je fais confiance au peuple vénézuélien. Je n’ai aucun doute que le résultat de notre combat sera la libération du Venezuela. Maduro est totalement isolé, plus faible que jamais. Et notre peuple veut savoir que je suis ici avec lui. »
Pour le comité Nobel, cette détermination à poursuivre la lutte malgré l’isolement symbolise « la flamme de la démocratie qui continue de brûler dans l’obscurité croissante du Venezuela autoritaire ».
Dans une vidéo publiée sur le site du Nobel, l’opposante, émue aux larmes, a réagi à la nouvelle : « Oh mon Dieu, je n’ai pas de mots. Je ne suis qu’une personne. Je ne mérite certainement pas cela. C’est l’accomplissement d’une société entière. »
Déception à Washington
La décision du comité a déçu la Maison-Blanche. Le président Donald Trump, souvent candidat malheureux au Nobel, espérait que sa médiation au Proche-Orient lui permettrait enfin d’être consacré.
« Ils ne me donneront jamais le prix Nobel de la paix. Je le mérite, mais ils ne me le donneront jamais », avait-il déclaré plus tôt cette année.
Selon Kate Bartlett de Voice of America, les pronostics donnaient Trump favori devant le réseau humanitaire soudanais Emergency Response Rooms, qui porte secours aux civils dans la guerre du Soudan. Mais les membres du comité ont privilégié « des efforts de paix constants » plutôt que des « victoires politiques rapides ».
Le directeur de la communication de la Maison-Blanche, Steven Cheung, a dénoncé sur le réseau X « un choix politique » : »Le Comité Nobel prouve encore qu’il privilégie la politique à la paix. Le président Trump continuera à conclure des accords de paix, à mettre fin aux guerres et à sauver des vies. Il a le cœur d’un humanitaire. »
Ironie du sort, la nouvelle lauréate avait récemment salué l’action du président américain. En août dernier, elle avait publiquement remercié Washington après que les États-Unis ont offert une prime de 50 millions de dollars pour l’arrestation de Nicolás Maduro, a fait remarqué NPR.
Depuis son retour à la Maison-Blanche, Trump a fait du Venezuela une priorité de sa politique régionale. L’armée américaine a mené quatre frappes dans les Caraïbes contre des embarcations soupçonnées de transporter de la drogue — trois d’entre elles provenaient de ports vénézuéliens, selon le Pentagone. Caracas dénonce une opération de « déstabilisation sous couvert de lutte antidrogue ».
Pour de nombreux observateurs, la distinction accordée à María Corina Machado dépasse le simple cadre d’un prix individuel. Elle consacre la persévérance d’une femme qui, malgré les menaces et la clandestinité, incarne la résistance démocratique d’un peuple privé de liberté.
Le Comité Nobel norvégien a résumé ce sentiment dans des termes clairs : elle « porte la voix d’un peuple étouffé » et « maintient vivante la flamme démocratique ».
Cette reconnaissance internationale donne un nouvel élan à l’opposition vénézuélienne et souligne la portée universelle de son combat — un combat que le monde regarde désormais avec attention.
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