Haïti : l’ONU condamne le massacre de Cabaret et appelle à renforcer la mission multinationale

Emmanuel Paul
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Emmanuel Paul est un journaliste chevronné et un conteur accompli, animé par un engagement profond envers la vérité, la communauté et l’impact social. Il est le...
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Le Secrétaire général des Nations Unies a fermement condamné l’attaque meurtrière qui a coûté la vie à au moins quarante personnes dans la commune de Cabaret, dans le département de l’Ouest d’Haïti, dans la nuit du 11 septembre.

Dans un communiqué transmis par son porte-parole Stéphane Dujarric, il a déclaré : « Le Secrétaire général condamne fermement le meurtre signalé d’au moins 40 personnes, dont des femmes, des enfants et des personnes âgées, lors d’une attaque brutale menée par des gangs armés dans la commune de Cabaret. »

Mais au-delà du drame de Cabaret, c’est tout un pays qui est marqué par une spirale de violences. Le Secrétaire général se dit « alarmé par le niveau de violence qui secoue Haïti » et exhorte les autorités à veiller « à ce que les auteurs de ces violations et abus des droits de l’homme soient traduits en justice. »

Dans ce climat, l’ONU appelle les États membres à intensifier leur soutien à la Mission multinationale d’appui à la sécurité (MMAS) — en personnel, en financement et en logistique — afin qu’elle puisse aider efficacement la Police nationale d’Haïti à combattre les gangs, « dans le plein respect du droit international des droits de l’homme. »

MMAS : origine, mandats et limites

La MMAS a été autorisée par le Conseil de sécurité de l’ONU via la résolution 2699, adoptée le 2 octobre 2023.

Elle est destinée à répondre à la demande du gouvernement haïtien d’appuyer ses forces de sécurité dans leur lutte contre les gangs, sous le Chapitre VII de la Charte des Nations unies.

La mission est principalement kenyane dans sa composante étrangère, complétée par des policiers d’autres pays.

Toutefois, à la mi-2025, la MMAS est loin d’avoir atteint ses objectifs opérationnels ou ses effectifs prévus. La mission devait initialement compter environ 2 500 policiers, mais des retards de déploiement, des difficultés logistiques et un financement insuffisant ont fortement limité sa capacité d’action.

Des critiques internes et externes pointent également les lacunes de la mission : manque de moyens, effectifs dispersés, communication difficile avec les communautés affectées, contraintes opérationnelles dans des zones contrôlées ou fortement contestées par les gangs.

Entre octobre 2024 et juin 2025, près de 4 864 personnes sont mortes à cause de la violence des gangs à travers Haïti.

Cette violence a entraîné des déplacements massifs : des centaines de milliers de personnes ont dû fuir leur foyer.

Les zones rurales et périphériques de Port-au-Prince sont de plus en plus affectées, y compris des communes comme Cabaret. Des attaques, des incendies volontaires, des massacres, des enlèvements et d’autres violations graves des droits humains sont signalés quasi quotidiennement.

Une résolution a récemment été introduite à l’ONU en vue de remplacer la MMAS par une force de répression onusienne de plus de 5 000 soldats. Des démarches sont actuellement en cours pour obtenir le soutien le plus large possible des États membres de l’ONU.

« Displaced families seek refuge in Saint-Marc, Haiti. »
Credit: UNICEF/Ralph Tedy Erol

Le massacre de Cabaret dans son contexte

Le communiqué de l’ONU date du 13 septembre 2025, à la suite de l’attaque brutale survenue dans la nuit du 11 septembre à Cabaret.

Cette commune du département de l’Ouest se trouve dans une zone déjà affectée par la présence et les incursions répétées des gangs.

Bien que les motifs précis ou l’identité des assaillants restent à confirmer publiquement, l’ONU les attribue à des « gangs armés » et insiste sur la nécessité que les coupables soient tenus pour responsables.

Le Secrétaire général exige que « les auteurs de ces violations et abus des droits de l’homme soient traduits en justice », soulignant l’impératif de rendre des comptes.

Le besoin de renforcement de la MMAS est ici mis en exergue : « dotant de la logistique, du personnel et du financement nécessaires », afin que cette mission puisse intervenir plus efficacement.

L’un des défis majeurs reste l’insuffisance des ressources allouées jusqu’à présent — financières, matérielles mais aussi humaines. Même si la MMAS existe, ses effectifs et sa capacité à couvrir le terrain dans des zones dangereuses demeurent limités.

Un autre défi concerne la souveraineté et la coopération locale : pour être acceptée et efficace, la MMAS doit travailler en étroite liaison avec la Police nationale d’Haïti, respecter les droits humains, être transparente et gagner la confiance des communautés affectées, souvent traumatisées par des années de violences, d’impunité et de mauvais traitements.

Le massacre de Cabaret s’inscrit dans une détérioration inquiétante de la sécurité en Haïti, dans un contexte où les gangs étendent leur contrôle, où l’État peine à maintenir sa présence et où les violences extrajudiciaires se multiplient. Le communiqué de l’ONU met l’accent sur deux axes essentiels : la justice pour les victimes et le renforcement de la MMAS comme instrument clé d’assistance sécuritaire.

Les prochains mois risquent d’être déterminants : si la communauté internationale ne répond pas aux appels de l’ONU pour renforcer la mission multinationale, le cycle d’attaques pourrait se poursuivre et les pertes humaines continuer à s’accroître. La capacité d’Haïti à rétablir l’ordre, à protéger ses citoyens et à restaurer un minimum de confiance dépendra largement de cette double exigence : justice et assistance sécuritaire crédible.

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