Un autre partisan du mouvement MAGA, d’origine cubaine, pourrait bientôt être expulsé des États-Unis.
Il a chanté la liberté de tout un peuple, dénoncé la répression à visage découvert, et brandi haut les couleurs du combat contre le régime cubain. Aujourd’hui, Eliexer Márquez Duany — plus connu sous le nom d’artiste El Funky — risque l’expulsion des États-Unis, le pays où il avait trouvé refuge et dont il soutient ardemment le président, Donald Trump.
Selon un article de Politico publié le 20 mai 2025, les autorités de l’immigration lui ont récemment notifié un refus de sa demande de résidence permanente, déposée dans le cadre du Cuban Adjustment Act — un dispositif qui a longtemps facilité la régularisation des migrants cubains. Faute d’un recours accepté, il dispose de moins d’un mois pour quitter le territoire américain.
El Funky s’est fait connaître en 2021 grâce au morceau « Patria y Vida », un hymne contestataire coécrit avec plusieurs artistes cubains, dont certains purgent encore aujourd’hui des peines de prison. La chanson, censurée à Cuba, a galvanisé la jeunesse et donné une voix aux manifestations historiques de l’été 2021. Invité aux Latin Grammy Awards cette même année, El Funky a saisi l’occasion pour fuir l’île, escorté jusqu’à l’aéroport par un fonctionnaire qui lui aurait lancé : « Ce que nous voulons, c’est que tu partes. Mais ne reviens pas », selon Politico.
Arrivé à Miami, il a rapidement tenté de se reconstruire. Marié à une Américaine d’origine cubaine, il travaille dans une école chrétienne et poursuit sa carrière musicale. Son parcours semblait suivre celui de tant d’autres exilés cubains avant lui — jusqu’à ce que la machine administrative se grippe.
Paradoxalement, c’est sous l’administration Trump, qu’il défend sans réserve, que son avenir est désormais compromis. « Si je pouvais voter, j’aurais voté pour Trump », a-t-il confié à Politico. « C’est le président le plus ferme concernant Cuba. » Pourtant, malgré cette fidélité idéologique, il pourrait être renvoyé dans un pays où il est considéré comme un ennemi politique.
Le cas de Márquez Duany illustre la transformation récente de la politique migratoire américaine à l’égard des Cubains. Si le Cuban Adjustment Act reste théoriquement en vigueur, ses effets sont réduits par la baisse des admissions sous statut humanitaire et la reprise des expulsions vers Cuba, entamée sous Trump et poursuivie par l’administration Biden. D’après les éléments rapportés par Politico, son dossier de régularisation comportait des erreurs, ce qui a précipité le refus. Un nouvel avocat tente désormais de déposer une demande d’asile, dans l’urgence.
Autre fait marquant souligné par Politico : le silence des élus républicains de Floride, qui avaient salué l’impact de « Patria y Vida » lors de sa sortie. Marco Rubio, désormais secrétaire d’État, n’a fait aucune déclaration. Idem pour les représentants Mario Díaz-Balart et Carlos Giménez. Seule María Elvira Salazar a pris la parole, qualifiant El Funky de « réfugié politique [qui] mérite la pleine protection de la loi américaine sur l’immigration ». Son bureau a indiqué suivre le dossier auprès de l’USCIS, sans promesse de résultat.
Ce silence contraste avec le soutien affiché autrefois. Dans les cercles cubano-américains conservateurs, la foi en Trump reste largement partagée, notamment sur les radios comme Radio Mambí. El Funky lui-même continue de croire en la fermeté du président : « Je comprends qu’on essaie de se débarrasser de ceux qui ne devraient pas être ici. Mais Trump devrait examiner chaque cas individuellement — comme le mien. » (source : Politico)
Dans une récente chanson intitulée « Inmigrante », le rappeur livre une vision intime et mélancolique de sa condition d’exilé :
Je ne suis qu’un immigrant de plus /
Qui veut seulement avoir un rêve /
J’ai la foi que je vais y arriver /
J’ai besoin de force et de santé pour continuer.
Craignant pour sa vie en cas de retour forcé à Cuba, Eliexer Márquez Duany continue de plaider désespérément sa cause auprès de l’administration d’extrême droite de Donald Trump.
« Je ne vais pas me taire », affirme-t-il. « À Cuba, tout le monde sait qui je suis. Retourner là-bas met ma vie en danger. »
Aux États-Unis, les communautés cubano-américaines comptent parmi les rares groupes d’origine étrangère à soutenir massivement le Parti républicain.
Longtemps épargnés par les politiques migratoires des différentes administrations, beaucoup pensaient pouvoir conserver ce privilège sous Trump 2.0, qu’ils ont largement contribué à ramener au pouvoir lors de l’élection présidentielle de novembre 2024. Comme l’a fait remarquer Ana Sofía Peláez, du Miami Freedom Project, il s’agit d’un moment de « véritable stupéfaction ». Ce n’est que maintenant que de nombreux Américains d’origine cubaine commencent à prendre conscience qu’eux aussi peuvent être pris dans le filet de plus en plus serré de la politique migratoire américaine, a-t-elle regretté.