Alors qu’Haïti s’enlise dans une crise sécuritaire et institutionnelle sans précédent, des milliers de ressortissants haïtiens continuent d’être expulsés du territoire dominicain.
Rien qu’au mois de mai 2025, l’armée de la République dominicaine (ERD) a remis 16 501 migrants haïtiens en situation irrégulière à la Direction générale des migrations (DGM), dans le cadre des opérations de rapatriement.
Ces interventions, menées quotidiennement par des unités militaires, ont été particulièrement intensifiées dans plusieurs provinces frontalières telles que Dajabón, San Juan, Elías Piña et Pedernales. Parallèlement, 55 personnes ont été traduites en justice pour des faits liés au trafic de migrants, selon le quotidien dominicain Diario Libre.
Ces chiffres témoignent de l’ampleur des mesures de contrôle migratoire en République dominicaine, où l’armée joue désormais un rôle central dans l’arrestation de migrants haïtiens en situation irrégulière.
Le processus est devenu systématique : interpellation sur le terrain, transfert dans des centres de rétention, puis remise aux autorités migratoires en vue du rapatriement.
Si les autorités dominicaines mettent en avant la légalité de ces opérations, plusieurs organisations de défense des droits humains dénoncent la brutalité des arrestations, les conditions de détention, et l’absence de garanties procédurales. L’absence d’un cadre bilatéral clair pour la gestion de ces retours ne fait qu’aggraver les inquiétudes.
Du côté haïtien, c’est le silence. Aucune déclaration officielle n’a été faite par les autorités compétentes à propos de ces déportations massives. Pire encore, aucun dispositif d’accueil, de recensement ou d’assistance n’a été mis en place. La majorité des rapatriés se retrouvent sans ressources, parfois abandonnés dans des zones contrôlées par des groupes armés.
Ce désengagement institutionnel alimente un profond sentiment d’abandon chez des citoyens qui ont fui la misère, la violence et l’absence de perspectives.
Beaucoup, expulsés sans accompagnement ni suivi, n’ont d’autre option que de tenter à nouveau la traversée — au risque d’être pris dans l’engrenage de l’exploitation, ou de faire face, encore une fois, au rejet.
Les Haïtiens en République dominicaine ne sont pas les seuls à faire face à des hostilités à l’étranger. Aux États-Unis, plus de 320 000 ressortissants haïtiens bénéficiaires du programme Biden sont menacés de déportation, après que la Cour suprême a annulé une décision d’une juge fédérale ordonnant à l’administration de suspendre sa tentative de révoquer le statut légal des bénéficiaires du programme CHNV.
D’un autre côté, le Statut de protection temporaire (TPS) des immigrants haïtiens arrive à expiration dans deux mois. L’administration Trump devrait annoncer dans les prochaines 24 heures si elle compte le renouveler ou non.
Si le TPS devait être révoqué, plus de 600 000 Haïtiens risqueraient d’être expulsés des États-Unis, en plus des milliers d’autres en République dominicaine qui font face à une menace quotidienne de déportation.