Haïti-Violences armées: Médecins Sans Frontières contraint de fermer définitivement son centre d’urgence de Turgeau

Darbouze Figaro
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C’est un coup dur pour l’accès aux soins dans la capitale haïtienne.

Médecins Sans Frontières (MSF) a annoncé la fermeture définitive de son Centre d’Urgence de Turgeau, situé au cœur de Port-au-Prince. Une décision « prise en dernier recours » face à l’intensification des violences armées qui rendent toute activité médicale impossible et trop périlleuse dans cette zone, a expliqué l’ONG dans un communiqué transmis à la presse mardi 14 octobre.

Cette structure, qui employait 206 personnes et avait pris en charge plus de cent mille patients entre 2021 et mars 2025, avait déjà suspendu ses activités en mars dernier suite à un grave incident de sécurité. Depuis, l’organisation humanitaire a mené plusieurs évaluations techniques, cherchant désespérément des solutions de protection balistiques pour sécuriser le site.

« Aucune option n’a permis de garantir un niveau de sécurité suffisant », déplore Jean-Marc Biquet, Chef de Mission de MSF en Haïti.

La localisation du centre, en proie à des affrontements réguliers, le rend particulièrement vulnérable. « Le bâtiment a en effet déjà été touché à plusieurs reprises par des balles perdues », précise-t-il, rendant toute reprise des activités « trop dangereuse pour les patients comme pour le personnel ».

La fermeture du centre de Turgeau intervient dans un contexte d’insécurité chronique qui cible directement le personnel et les missions médicales. MSF rappelle une série d’incidents tragiques qui ont marqué ses opérations dont une attaque contre un convoi de MSF pris pour cible sur l’Avenue Christophe, le 15 mars 2025 ; le détournement d’une ambulance de l’institution à Delmas 33, le 11 novembre 2024 au cours duquel le personnel avait été menacé et les patients exécutés ; puis e 12 décembre 2023 où un patient avait été arraché d’une ambulance et exécuté à quelques mètres seulement du centre de Turgeau.

Cette accumulation d’événements violents illustre l’effondrement du respect de l’espace humanitaire et médical, pourtant crucial pour des milliers de civils.

« MSF regrette profondément cette décision », souligne Jean-Marc Biquet, conscient de « l’impact significatif sur l’accès aux soins pour une population déjà durement touchée par la violence, l’instabilité et des conditions de vie de plus en plus précaires ». Le centre de Turgeau était un maillon essentiel du système de santé en déliquescence de la capitale, offrant des soins d’urgence à une population captive de la violence.

Malgré cette fermeture, l’organisation affirme rester « pleinement mobilisée » et continue d’explorer « activement toutes les alternatives » pour maintenir son soutien médical à Port-au-Prince et à Carrefour.

Cependant, un obstacle majeur persiste pour certaines de ses activités. MSF indique qu’elle « attend toujours la signature d’un protocole d’accord établissant un couloir humanitaire entre Port-au-Prince et Carrefour ». Cette étape est présentée comme une « condition préalable » au redémarrage des activités suspendues depuis mars 2025.

L’organisation en profite pour lancer un appel solennel à « toutes les parties au respect du travail humanitaire et médical », rappelant que l’action médicale doit pouvoir se dérouler « en toute neutralité, dans un espace protégé des violences ».

En dépit de ce recul à Turgeau, MSF poursuit sans relâche ses autres activités dans la capitale à travers l’hôpital Tabarre, le centre d’urgence de Cité Soleil, la clinique Pran Men’m, les soins de santé primaire à Delmas 4, Bel Air, Bas Bel Air/La Saline et la maternité Isaïe Jeanty, récemment rouverte en partenariat avec le ministère de la Santé.

La fermeture définitive du centre de Turgeau reste un symbole amer de la situation catastrophique en Haïti, où la population, prise en étau entre une crise politique et une violence endémique, voit peu à peu ses derniers filets de protection humanitaire se déchirer.

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