La crise alimentaire en Haïti atteint des proportions alarmantes. Dans une déclaration émise lundi 28 , l’ONG Action contre la Faim (ACF) tire la sonnette d’alarme : plus de 50% des Haïtiens, représentant environ 5,7 millions d’individus, se trouvent actuellement en situation d’insécurité alimentaire sévère.
Cette situation sans précédent, mise en lumière par le récent rapport du Cadre intégré de classification de la sécurité alimentaire (IPC), résulte de la violence persistante des gangs armés, de la dégradation économique généralisée, et du désengagement progressif des acteurs humanitaires internationaux.
Parmi les populations touchées, plus de 8 400 personnes déplacées, résidant dans des camps de fortune, sont classées en phase 5 de l’IPC, niveau critique équivalent à une situation de famine. De plus, 2,1 millions d’Haïtiens (19 % de la population) se trouvent en phase 4, qualifiée d’« urgence », et 3,6 millions (32 %) en phase 3, dite de « crise ».
ACF souligne plusieurs facteurs critiques. Les affrontements armés, notamment à Port-au-Prince et dans l’Artibonite, ont entraîné des exodes massifs. L’OIM rapporte que le nombre de déplacés internes a grimpé à 1,04 million fin 2024, marquant une augmentation de 48 % en six mois.
Simultanément, la désintégration du système économique, tant formel qu’informel, associée à une inflation galopante de 30 % en février 2025, a considérablement limité l’accès aux produits essentiels. L’augmentation des prix alimentaires aggrave la situation des foyers déjà fragilisés.
Cette situation est exacerbée par la réduction drastique de l’aide humanitaire. Jusqu’en février 2025, environ un million de personnes recevaient une assistance alimentaire mensuelle. Depuis mars, plusieurs programmes ont été interrompus par manque de ressources. « Les financements s’épuisent alors que la moitié de la population souffre de malnutrition », s’inquiète Martine Villeneuve, directrice d’ACF en Haïti.
Face à cette situation, ACF intensifie ses interventions dans les zones les plus affectées, particulièrement dans les camps de déplacés et les secteurs contrôlés par les gangs. L’organisation poursuit ses services de santé et de nutrition, notamment via des unités médicales mobiles pour rejoindre les communautés isolées.
ACF exhorte la communauté internationale à assurer un accès humanitaire libre et à respecter les principes humanitaires internationaux. L’organisation souligne que ses programmes multisectoriels ont aidé plus de 170 000 personnes à travers le pays en 2024.
Sans une intervention immédiate des donateurs et des autorités haïtiennes, la situation risque de dégénérer en catastrophe humanitaire majeure dans les semaines à venir.
