Samarone Alves Ferreira-De Souza, un père de famille résident à Worcester, dans le Massachusetts, a été expulsé vers son pays natal. Son seul « crime » : avoir klaxonné un véhicule civil appartenant à un agent de l’Immigration and Customs Enforcement (ICE), selon une enquête publiée par MassLive et relayée par The Lawyer Herald.
Ce simple incident de circulation a conduit à son arrestation, à une expulsion précipitée et à la dislocation temporaire du foyer familial de sa compagne.
Ferreira-De Souza, père d’un nourrisson de quatre mois, a été interpellé par des agents de l’ICE le 7 mai alors qu’il se rendait à son travail. Selon son avocate, cette arrestation fait suite à un banal incident routier impliquant des agents de l’immigration en civil. L’affaire a pris une ampleur inattendue, entraînant également l’arrestation de membres de la famille de sa compagne et suscitant de sérieuses inquiétudes quant au respect des procédures légales par l’ICE.
Peu après son arrestation, Ferreira-De Souza a été transféré dans un centre de détention en Louisiane. Ayant refusé de signer son ordre de déportation, les autorités de l’ICE auraient apposé sa signature sans son consentement, selon son avocate. Il a été expulsé vers Fortaleza, au Brésil, le 25 mai, sans avoir eu accès à une représentation légale dans les derniers jours de sa détention, rapporte The Lawyer Herald.
Sa compagne, Augusta Clara Moura, prévoit de le rejoindre au Brésil avec leur bébé le 6 juin, selon les informations de MassLive. Sa mère est toujours en détention sous la garde de l’ICE, tandis que ses jeunes frères et sœurs ont été placés sous la responsabilité des services sociaux.
L’ICE n’a pas encore émis de commentaire officiel concernant cette expulsion ni les allégations de violations de procédure. L’avocate de Ferreira-De Souza dénonce ce qu’elle décrit comme un » modèle récurrent de violations des droits » par l’agence fédérale.
Bien que Ferreira-De Souza ait choisi de ne pas contester son expulsion, affirmant être épuisé par le processus, l’incident relance le débat sur les méthodes employées par l’ICE, notamment dans les États dits « sanctuaires » comme le Massachusetts. Des défenseurs des droits des immigrés réclament davantage de transparence et de contrôle sur les pratiques de l’agence.
Opération Patriot : 1 500 arrestations par l’ICE dans le Massachusetts en mai
Pour le seul mois de mai, près de 1 500 personnes ont été arrêtées à travers le Massachusetts dans le cadre d’une opération baptisée Operation Patriot, a annoncé Patricia Hyde, directrice du bureau ICE de Boston, lors d’une conférence de presse conjointe au tribunal fédéral de Boston.
Selon Hyde, toutes les personnes arrêtées étaient en situation irrégulière. Parmi elles, 790 présentaient ce que les autorités qualifient de « criminalité significative », que ce soit aux États-Unis ou dans leur pays d’origine. « Tous ont commis l’erreur de tenter de contourner la justice en se cachant dans le Massachusetts », a-t-elle déclaré.
Le directeur par intérim de l’ICE, Todd Lyons, a précisé que les interpellations ont eu lieu dans plusieurs villes de l’État, notamment Boston, Worcester, Springfield, Lowell, Lawrence, Nantucket et Martha’s Vineyard. Il a évoqué des cas impliquant « le trafic de drogue, des infractions sexuelles, des cas de maltraitance d’enfants et des accusations de meurtre ».
La procureure fédérale du Massachusetts, Leah Foley, a déclaré que son bureau concentre ses efforts sur les personnes en situation irrégulière représentant une menace pour la sécurité publique : « Ces individus n’ont pas seulement franchi une frontière, ils ont franchi une ligne et mettent en danger la sécurité des communautés du Massachusetts », a-t-elle affirmé.
Selon ICE, 277 des personnes arrêtées avaient déjà reçu un ordre d’expulsion. Néanmoins, aucune liste nominative n’a été rendue publique pour des raisons de confidentialité, bien qu’un poster affichant plusieurs visages ait été présenté à la presse.
Interrogée sur l’absence de coordination avec les forces de l’ordre locales, Patricia Hyde a précisé : « Bien que nous souhaitions une coopération bénéfique avec nos partenaires locaux, nous continuerons à agir même sans leur aide si nécessaire pour assurer la sécurité du Massachusetts. »
L’arrestation d’un lycéen attire l’attention
Un cas particulier a suscité une vive réaction : l’arrestation de Marcelo Gomes Da Silva, un lycéen de 18 ans, alors qu’il se rendait à un entraînement de volley-ball. ICE a confirmé que le jeune homme n’était pas la cible principale, mais qu’il conduisait la voiture de son père, recherché par les autorités.
« Il n’était pas notre cible », a reconnu Patricia Hyde. « Mais comme nous l’avons souvent répété, les politiques de sanctuaire nous obligent à aller dans les communautés. Et lorsque nous y trouvons d’autres personnes en situation irrégulière, nous les arrêtons. »
À ceux qui ont demandé pourquoi le jeune homme a été arrêté s’il ne représente pas une menace, Todd Lyons a répondu : « Je n’ai pas dit qu’il était dangereux. J’ai dit qu’il est dans ce pays illégalement. Et nous ne détournerons le regard pour personne. »
Lyons a précisé que Gomes Da Silva aura droit à une procédure régulière : « ICE ne rafle pas les gens dans la rue pour les expulser immédiatement. Tout le monde bénéficie d’une procédure régulière. Il passera devant un juge de l’immigration et aura la possibilité de demander une libération sous caution. »
Ces arrestations massives suscitent une vive inquiétude parmi les élus et les citoyens. La représentante Ayanna Pressley a qualifié l’opération de » stratégie coordonnée pour déstabiliser les communautés », affirmant : » Cela n’a rien à voir avec la sécurité publique, mais tout à voir avec le pouvoir, le contrôle et l’intimidation. »
La maire de Boston, Michelle Wu, a comparé les agents de l’ICE à une « police secrète », tandis que le député Seth Moulton a évoqué une « Gestapo » après l’arrestation d’une étudiante de Tufts par des agents en civil.
Enfin, Todd Lyons a défendu le port de masques par ses agents lors des interpellations : « Des gens prennent des photos et les publient en ligne avec des menaces de mort. Je suis désolé si cela dérange, mais je ne mettrai pas mes agents en danger », a-t-il conclu.